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24/10/2010

Où sommes-nous?

11/10/2010

Nouvelle Page Luc

 

 

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  J 70  à J87 ( ou à peu près)

 

 Bonjour à tous , après une longue absence due avant tout à la disparition d' internet (heureusememt que des coins y échappent encore), donc je disais que 900 km de piste à vélo et 400 km de  4x4 plus loin, beaucoup de choses se sont passées et trois pays ont été traversés et retraversés. Je ne suis pas en mesure de vous en faire un CR en quelques centaines de mots. En effet une grande partie du trajet se déroula dans des zones complètement ignorées des guides , je pense à la partie de la Bolivie entre le lac Titicaca et les parcs du nord du Chili. Que vous dire en trois mots de cette Bolivie aux décors dignes de Sergio Leone ,de ces parcs et aussi des grands salars boliviens, où l on pousse son vélo sans savoir où l' on va , ou pour parler du salar d Uyuni, après avoir éviter quelques pièges (qui auraient pu se révéler dangereux), on parcourt 145 k sur du sel dur et roulant, un rêve pour le vélo. Je prendrai le temps de relater ces expérences, mais plutôt par partie.

Je viens de laisser mes compagnons qui vont traverser le sud Lipez à vélo, pour ma part je viens de le faire en 4x4, en trois jours, fabuleux. Je suis en mesure de dire pourquoi j ai décidé de ne pas continuer la piste, ce que certains pourraient considérer comme de la facilité. Ce type de voyage est très personnel et lorsqu il sort de  son épure, il ne veut plus rien dire. Je suis à San Pedro de Atacama. Demain je prends le bus pour Santiago et un retour rapide en France. Pour moi le voyage est terminé et sur ce blog je vous donne seulement l'adresse de mon blog perso sur lequel je ferai part de mes sensations une fois qu' elles auront décanté. Mais je n' oublie pas le challenge que m' a lancé Adrien , dur car il faut se souvenir qu'à notre époque de voyage tous azimuts avec nos récits que l' on croit ( souvent par narcissisme) hors du commum, on barbe royalement l 'assistance.  

http://mesbaladesetescalades.hautetfort.com/ , mais un peu de patience, je n' ecrirai pas avant trois semaines, , un grand merci de m' avoir soutenu, car ce n' est pas si facile de partir, en effet on part toujours malgré.   Luc  

J70 mardi 26 octobre,

visite lac Titicaca

Nous avons passé la journée sur le lac Titicaca. Visite de plusieurs îles, dont les fameuses îles flottantes en roseau. Il y en a une soixantaine, de quelques centaines de mètres carrés à quelques hectares; elles sont habitées par des familles indiennes.

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 Lieu très touristique, où l'on croise de nombreux occidentaux. Journée intéressante, même si les distances entre les îles sont longues. Nous avons fait au mois six heures de bateau.

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A partir de demain nous rejoignons la frontière bolivienne, et repartons à vélo en direction du Chili. Nous risquons de rester une période assez longue sans contact mail. En effet les deux cent cinquante kilomètres de traversée de cette paie de la Bolivie entre le Pérou et le Chili, nous avons très peu d'informations dessus. Nous savons seulement que les routes ne sont pas toujours goudronnées et qu'il s'agirait plutôt de chemins, mais nous avons déjà l'habitude. Mais impossible de prévoir un temps de parcours. Nous devrions arriver à la frontière chilienne par le parc national bolivien de Sajama, qui porte le nom d'un volcan de plus de 600 mètres.

 

J69 lundi 25 octobre

Cusco à Puno en bus 4 ou 500 kilomètres

Nous quittons cette étonnante ville de Cusco un peu à regrets, d'autant plus que je n'ai pas vraiment pris le temps de la visiter. En effet à notre arrivée, ma première préoccupation a été de trouver une moyen de partir visiter Machu Picchu dès le lendemain. Une fois cette opération effectuée, nous sommes allés manger puis la visite d'un musée et la journée était écoulée, car le matin nous avions roulé. Donc au petit matin par des rues presque désertes, nous nous rendons au terminal terrestre, d'où partent les bus. Tout y est bien organisé et les risques de vol sont limités si l'on fait preuve de vigilance. L'opération la plus délicate est le chargement des vélos dans les soutes. Mais nous commençons à bien maîtriser ce type de chargement. Le voyage va durer 6heures trente, à travers l'altiplano. La route, presque toujours bien droite, traverse une large plaine située près des quatre mille mètres. Nous nous disons qu'à vélo cette longue portion aurait été bien monotone, même si le paysage est de toute beauté. En particulier, une luminosité particulière, sans doute due à l'altitude et aux teintes jaunes de l'herbe, donne au paysage une touche de toute beauté. Au cours du trajet, des indiennes montent et vendent leurs produits. Nous achetons des petits pains ronds en forme de galettes. Ils sont absolument succulents, bien grillés et croustillants sous la dent. Enfin, nous sentons que le lac Titicaca approche. En effet toute forme disparaît de l'horizon, comme si la Terre devant nous tournait au néant. On ne voit plus rien et pas encore l'eau du lac, impression étrange. Puis une mince bande bleu profond apparaît et enfin le lac se découvre. L'arrivée sur la ville de Puno est très originale. Une ville de grande dimension nichée entre eau et montagne.

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 Ces montagnes sont pelées, mais ressemblent plus à de grosses collines qu'à l'idée que l'on se fait de sommets de plus de quatre mille cinq cents voire cinq mille mètres. Les constructions sont dans des tons ocres qui s'harmonisent avec la végétation environnante. Le déchargement des vélos se fait sans problème et nous voilà à la recherche d'un hôtel. On se renseigne dans le premier venu, qui n'a d'ailleurs pas de chambre libre. Alors que nous nous concertons pour savoir dans quelle direction poursuivre nos recherche d'hébergement, une voiture de police s'arrête à notre hauteur. Je m'approche, le policier me tend la main par la fenêtre ouverte; Il me demand ce que je fais là. Je lui fais part de notre recherche. Il me répond de ne surtout pas rester dans ce coin car nous risquons de nous faire voler. Il m'indique un hôtel un peu plus loin, qui sera parfait pour une somme modique. Un petit tour dans la ville, nous achetons quelques gâteaux, très bons. Bientôt nous allons quitter le Pérou, nous espérons seulement que dans les prochains pays, Bolivie et Chili la nourriture sera d'une qualité équivalente. Par l'intermédiaire de notre hôtelier nous réservons pour demain une longue balade en bateau sur le lac Titicaca, à la découverte de ses îles flottantes ou non.

 

J68 dimanche 24 octobre

Visite Machu Picchu

Nous découvrons ce lieu. Nous y montons en bus. Le spectacle est grandiose. Nous avons de la chance, le ciel se découvre à peu près et l'ensemble du cirque se dévoile. De ces pentes quasi-verticales et colonisées par la végétation, toutes nimbées de brouillard, se dégage une impression forte et mystérieuse. On imagine les Incas quelques cinq cents ans plus tôt, qui eux aussi levaient les yeux vers ces pics. Nous montons sur la montagne qui domine, par un chemin raide.

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 Nous avons eu de la chance de pouvoir en faire l'ascension, car pour des problèmes de préservation du site, seules quatre cents personnes sont autorisées à y monter chaque jours. Grâce à notre guide, qui nous a expliqué qu'en fonction des désistements vers les dix heures un petit nombre de personnes hors cota pouvaient monter. Nous avons fait partie de ce petit nombre, et sans avoir eu à faire la queue depuis cinq heures trente du matin pour obtenir le fameux sésame sur le billet d'accès au site. La vue du haut est vraiment époustouflante.

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 Après les derniers quinze jours où nous avons vu très peu d'Occidentaux, il est étrange, et je dois reconnaître pas désagréable, de se trouver au milieu de cette foule de touristes, dont il ne faut pas oublier, nous faisons partie. Les prix sont multipliés par beaucoup et on se fait un peu arnaquer. Le prix du café est le double de celui d'un repas de bonne qualité dans les régions que nous venons de traverser. L'après-midi une foule gigantesque envahit le lieu. Le retour en car depuis Machu Picchu jusqu'à Agues Calientes, demande une longue queue devant les bus qui font la noria sur une piste en lacets dans une pente vertigineuse. L'impression de vide est cependant atténuée par la végétation dense qui masque bien souvent les perspectives aériennes. Notre train est prévu à 19 heures, nous avons tout notre temps pour nous promener dans cette ville artificielle destinée à héberger pour une nuit les visiteurs de ce lieu mythique de la planète. Notre train arrive, il nous dépose vers les 22heures à une cinquantaine de kilomètres de Cusco. Malgré la somme non négligeable que nous a coûté cette prestation, le taxi chargé de nous ramener à Cusco n'est pas là. Nous trouvons refuge dans un mini-bus qui transporte une famille de Sri-Lankais, qui viennent de parcourir le chemin de l'Inca. Dans le fond pour une somme supplémentaire modique nous avons passé une heure trente très agréable et instructive avec ces passagers dont une partie habite en Australie et une autre dans leur pays d'origine.

 

J67 samedi 23 octobre

Visite Machu Picchu

Avec Alain nous partons pour Cusco par le train. La voie remonte une longue vallée aux pentes pelées, on se croirait dans la vallée de la Bérarde en beaucoup plus long et plus étroit. L'arrivée à Agues Calientes est impressionnante. Le site est enserré entre des montagnes très raides couvertes de végétation. Un village de constructions pour touristes, genre lodges du fond de la vallée de l'Annapurna, se blottit au pied de ces faces abruptes. Il y a pas mal de monde et cependant, on est en basse saison. Le Machu Picchu attire 450 000 visiteurs par an. Cela peut paraître beaucoup, mais comparé à Lourdes deux millions ou le Mont saint Michel, qui je crois est visité au moins un million de fois l'an, cela n'est pas énorme pour un site de cette notoriété.

 

 

 

J66 vendredi 22 octobre

Ancahuasi à Cusco 45 km

Enfin nous allons rejoindre cette ville mythique. J'attendais cela depuis déjà longtemps. L'étape est courte. A onze heures nous y sommes. Nous trouvons un superbe hôtel qui donne sur la ville et ses collines environnantes.

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J65 jeudi 21 octobre

Curahuasi à Ancahuasi 81 km

Le grand village où nous avons passé la nuit est très agréable. L'hôtel qui nous accueilli superbe, le propriétaire vraiment gentil. Depuis notre départ de Quito, l'hébergement a pratiquement toujours été de qualité tout à fait acceptable. L'itinéraire de la journée commence par une descente de trente kilomètres qui nous fait descendre jusqu'à deux mille mètres.

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A cette «basse» altitude des nuées de moustiques sévissent. Mais cela ne va pas durer. En effet il nous faut remonter à un col à trois mille sept cent cinquante mètres. Cette côte est longue de 45 kilomètres. Par moments, il fait chaud. Je trouve l'exercice difficile, bien que la pente, comme toujours au Pérou ne soit pas très forte, rarement au-dessus de cinq ou sxs pour cent. Enfin le col, il est trois heures. Le temps devient très menaçant. Dans le lointain de gros éclairs zèbrent le ciel. Une courte descente de six kilomètres nous conduit à Ancahuasi. Nous décidons de nous arrêter. Un semblant d'auberge nous offre une pièce dans laquelle la propriétaire met deux matelas au sol, un lit en planches se trouvant déjà dans le local. Il était temps d'arriver, des trombes se mettent à tomber et ne s'arrêteront que vers minuit. Nous allons boire une bière dans une épicerie, on nous propose gentiment trois chaises et en sirotant notre Cusquenia, nous regardons les Indiennes faire leurs courses du soir. Puis nous allons manger le traditionnel «pollo con papas fritas» dans un minuscule local, où il fait pour une fois chaud, car nous sommes à proximité du four à bois. Le retour à notre chambre dans la nuit, la pluie et la boue est un calvaire. La propriétaire nous attendait et vient à notre rencontre avec une lampe électrique.

 

J64 mercredi 20 octobre

Abancay à Curahuasi 72 km

Ce matin le temps n'est pas terrible. La pluie menace très sérieusement. Nous déjeunons dans une pâtisserie et nous gavons de gâteaux. L'heure du départ, pas très matinale sonne, il est huit heures trente. Nous ne montrons pas un grand enthousiasme. En effet, la route qui conduit à un col un peu au-dessus des quatre mille mètres est complètement dans les nuages et la pluie commence à s'installer. Nous partons quand même. Les dix premiers kilomètres se feront sous une pluie assez consistante, puis des accalmies nous permettent d'envisager de passer ce col sans trop de difficulté. La côte s'étend sur trente sept kilomètres. A quatorze heures nous sommes au sommet. Il ne fait pas chaud et nous sommes mouillés. Une immense descente nous conduit dans la charmante petite ville de Cua. Une vingtaine de kilomètres avant, nous nous arrêtons déjeuner dans un restaurant en bordure de route. On nous sert une viande de porc absolument succulente. Dans deux jours nous serons à Cusco.

J63 mardi 19 octobre

Kishuara à Abancay 84 km dont 70 de piste

Dans un premier temps peu de montée, en six kilomètres nous rejoignons un col à 4100 mètres. Un petit établissement, nous nous y arrêtons boire un café en compagnie d'un policier de la route en faction à ce point. Souvent nous avons des contacts amicaux avec la police.

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 C'est bien la première fois que nous marquons un arrêt prolongé après seulement six kilomètres. Mais nous venons de franchir le dernier col d'une longue série le long de cette piste. Nous repartons pleins d'espoir d'une étape facile. La route descend légèrement et après trente kilomètres nous voyons la ville d'Abancay s'étaler au fond de la vallée. L'un de nous estime la distance à vingt kilomètres, l'autre à trente. Et bien nous sommes loin du compte, il y a exactement encore cinquante quatre kilomètres à parcourir. La descente est infinie et sur cette piste il faut rester très vigilant, car parfois des zones molles ou des cailloux rendent l'équilibre précaire. D'ailleurs jean fera une chute, heureusement sans gravité. Nous perdons beaucoup d'altitude et nous passons en dessous des deux mille mètres.

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 La chaleur est étouffante; un vent chaud et rageur soulève des tourbillons de poussière. En fin nous atteignons une route goudronnée. Les quatre cents kilomètres de piste prennent fin. Nous nous croyons arriver, il n'en ai rien. Encore dix huit kilomètres et six cent cinquante mètres de dénivelé. La ville d'Abancay est toute en pente, et comme bien souvent au Pérou, elle est très animée. Ne multitude de commerces de tous genres, pâtisseries, quincailleries, pharmacies, épiceries, boutiques de mode cohabitent avec des vendeurs sur les trottoirs qui eux aussi proposent de tout, de l'herbe à cochon aux fruits et légumes et passant par une multitude d'habits.

 

J62 lundi 18 octobre

Andahuaylas à Kishuara (3900 m) 66 km de piste

 

Une fois de plus une immense montée de quarante cinq kilomètres va nous occuper toute la matinée voire un peu plus. Dans cette portion de quatre cents kilomètres de piste, nous nous imaginions traverser d'immenses régions sauvages et désertes hérissées de grandes montagnes. Il n'en est rien. Certes d'immenses pans de montagnes nous demandent de longues heures d'effort, mais bien souvent ils sont habités et cultivés. De plus la piste est un immense chantier sur lequel de nombreux ouvriers accompagnés d'énormes engins sont au travail. Le village, que nous atteignons vers les quinze heures, est perché sur une petite terrasse.

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 Nous trouvons un logement sommaire, mais pour la première fois nous ne trouvons pas de restaurant. Mais une petite épicerie nous fournit l'essentiel et nous nous confectionnons un repas tout à fait honnête.

 

J61 dimanche 17 octobre

Uripa à Andahuaylas (2900 m) 75 km de piste, passage à 4150 m

 

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Au matin le temps est assez beau, bien que de gros nuages menaçants rôdent. Les conditions pour rouler sont idéales. Temps frais, route encore humide, ce qui empêche les panaches de poussière, cependant suffisamment sèche pour ne pas coller trop aux pneus. Une longue montée de quarante et un kilomètres nous attend. Mais comme toujours au Pérou, la pente n'est pas très raide et la route fait d'immenses lacets. Une fois au point le plus élevé, nous pique-niquons à l'abri du vent dans un petit recoin en bordure de route. Il fait très bon même presque trop chaud. Le paysage est étonnant. Il n'y a pas autour de nous de grands sommets enneigés. On se croirait plutôt au milieu d'un énorme mont Lozère, culminant vers les cinq mille mètres. Cela est un peu étrange de se trouver dans de telles régions. En effet les cultures montent à plus de quatre mille mètres et nous ne nous sentons pas dans des contrées très reculées. le mont Lozère serait même plus sauvage. La descente sera en proportion avec la montée. Les quinze derniers kilomètres sont un enfer de nids de poule et de tôle ondulée. Les vélos sont soumis à rude épreuve. La ville d'Andahuaylas est agréable. Nous arrivons juste avant que l'orage n'éclate. A notre hôtel nous dînons avec deux Hollandaise qui visitent l'Amérique du Sud en voiture sur une période de six mois.

 

 

J60 samedi 16 octobre

 

 

Ocros à Uripa (3300 m) 69 km de piste

 

Aujourd'hui nous nous attendons à une étape longue, et le temps qui se dégrade généralement tôt nous inquiète quelque peu. En effet une fois la piste mouillée, une gangue de boue rend le pédalage très pénible et soumet la mécanique à très rude épreuve. Je n'oublie pas que j'ai déjà détruit une chaîne depuis notre départ. Elle a  tenu moins de trois mille kilomètres, 1500 faits en France et 1200 en Amérique du Sud. Les trente premiers kilomètres sont en descente, le long d'un flanc de montagne abrupt qui plonge sur 1200 mètres. L'impression est incroyable, on se croirait pendu au beau milieu d'un versant sans fond sur une piste, où cependant circulent  de véritables monstres équipés de remorques.

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 Le plus incroyable, alors que ces énormes semi-remorques à eux seuls occupent toute la piste, ils arrivent à se croiser. Cela relève du miracle et d'une dextérité extrême des chauffeurs. Ils occupent à tel point toute la piste, que hier dans une grande courbe je suis tombé face à l'un de ces mastodontes. Il s'est arrêté et je me suis glissé difficilement entre lui et la paroi rocheuses. Mes sacoches d'un côté touchant les roues et de l'autre la pierre!

 

Nous descendons jusqu'à deux mille mètres. La végétation tropicale est réapparue. Et de façon paradoxale elle  côtoie une végétation de région semi-désertique. T bien évidemment avec la chaleur les moustiques sont revenus et nous assaillent au moindre arrêt. La circulation n'est pas très importante. Mais les véhicules soulèvent de gros nuages de poussière, que nous respirons à pleins poumons. Nous sommes assez loin de l'idée de l'air pur au beau milieu de la plus longue chaîne de montagnes du monde!  Vers les midi, j'ai un petit coup de bambou, en particulier du au fait que j'ai pédalé ce matin avec mes chaussures de randonnée, bien moins adaptées que mes chaussures de vélo. Mais j'avais peur de tomber en ne pouvant pas décliper des pédales et sur ces routes devant de gros bus qui foncent il vaut mieux éviter. Déjeuner qui nous revigore et en avant pour les quinze derniers kilomètres. Malgré une petite alerte de pluie, le temps se maintient et nous débarquons dans une petite ville en pleine fête, comme on en voit souvent au Pérou. Un hôtel sympathique nous héberge. Nos montures, nos bagages et nous sommes de véritables momies de poussière. Nous avons effectué à peu près la moitié des 400 kilomètres de piste jusqu'à Abancay. Pour le moment, la difficulté rencontrée n'a rien à voir avec ce que nous avons vécu dans les pentes incroyablement raides d'Equateur.   

 

J59 vendredi 15 octobre

Abri à 4300 à Ocros 3200 m 72 km de piste

A 7h du matin après un petit déjeuner frugal nous démarrons. Le soleil présent réchauffe l'atmosphère et il fait bon. Il est étonnant de constater la rapidité des changements de températures dans ces régions d'altitude. Nous passons la zon qui a été dynamitée hier. En effet elle est de grande ampleur, plusieurs centaines de mètres de long, pour élargir la chaussée; Durant plus de 45 kilomètres nous allons rouler sur un terrain à peu près plat situé aux environs des 4200 mètres. La circulation est quasiment absente. Ce qui fera dire à Jean « les jours se suivent et ne se ressemblent pas». Au bout de ce plateau une longue descente en longues épingles à cheveux nous conduit à Ocros, petit hameau perdu au milieu des montagnes. Nous avons vraiment l'impression de nous sentir très loin au milieu des Andes. D'ailleurs cette partie Ayacutcho Abancay de 400 kilomètres, dans laquelle nous sommes engagée, est d'après certains la plus difficile du parcours à vélo des Andes.  Il est midi, nous avons bien roulé. Le temps par contre nous inquiète. De gros nuages très sombres occupent toute la partie de ciel que les montagnes, qui nous dominent, nous laissent voir. Nous déjeunons dans un ce ces petits locaux caractéristiques du Pérou. Pour un prix dérisoire une fois de plus nous sommes repus. A la fin du repas, la pluie commence. Plus de doute, il nous faut nous arrêter. Après quelque attente sous de grosses gouttes, deux chambres pour trois nous sont proposées. Ambiance agréable, matelas confortable(en ce qui me concerne) et montagne de couvertures, la nuit sera très bonne.

 

J58 jeudi 14 octobre

Ayacucho (2800) un abri à 4300m 45 km de piste

Nous quittons de bonne heure cette charmante petite ville, dont paraît-il la place d'armes est la plus belle du Pérou. 7H30 nous traversons des faubourgs embouteillés et rapidement la pente commence et va durer 45 kilomètres; Tout au long de ce trajet, de gros travaux d'amélioration sont en cours. De gros engins sont à l'œuvre, des camions d terrassement font des allers et venues incessants. De plus le trafic normal se superpose à cette activité. De toute évidence, ce n'est pas la grande solitude que nous affrontons. Les ouvriers tout au long du parcours nous interpellent pour nous dire que nous avons le bonjour de Nina et Rainer, les deux Allemands. C'est par l'un d'eux que nous apprendrons leur conditions d'hébergement de la nuit précédente. Vers quinze heures nous atteignons le point haut, situé vers les 4200 mètres. Mais pas de descente derrière, mais un immense plateau; de plus un grand tir de mines est prévu est nous sommes bloqués. Situation la pire que nous puissions envisagée. Arrêtés pour un long moment au plus haut, le temps qui  se dégrade rapidement. Au-dessus de la route à quelques centaines de mètres un bâtiment en dur. Avec Alain nous partons à pied nous renseigner. L s'agit d'un édifice hébergeant le garde de la réserve naturelle d e la région. Très gentiment il nous permet de nous installer dans l'une de ses dépendances.  Rapidement nous sommes tous les trois à l'abri. Il était temps tout autour les ondées commencent à se déverser. A ces altitudes, les conditions météo  défavorables rendent vite la situation très désagréable.

Nous trouvons trois matelas et passons une nuit fort satisfaisante.

J57 mercredi 13 octobre

Repos Ayacucho

Ce matin à 6 heures, les voitures du" Paris Dakar  péruvien" faisaient un tour de la Plaza de Armas avant de se présenter au départ à la sortie de la ville. J'ai eu la flemme de me lever. A huit heures nous déjeunons avec les deux cyclotouristes allemands que nous avions rencontrés précédemment. Comme nous ils ont fait une partie en bus, mais pas la même. Aujourd'hui ils reprennent la route. Nous discutons longuement et vers les neuf heures bien dépassées ils partent. L'étape est longue. Il faut passer un col à 4200 mètres et la ville est à 2800, et c'est de la piste. On apprendra demain, qu'ils ont été pris dans la tourmente, et que les travailleurs qui refont la route leur ont permis de dormir dans un de leur camion. Pour nous farniente. Nous visitons le musée de la réconciliation,  qui retrace la double barbarie dans le cadre du mouvement sentier lumineux. Une contestation violente forçant les gens à les rejoindre, et une réaction brutale et arbitraire du gouvernement. J'en ai aussi profité pour me racheter un dictionnaire espagnol français ainsi que deux livres bilingues espagnol anglais. Le premier à mourir de rire «la rançon du chef indien ». la pluie est venue tôt et elle a été violente. On a l'impression que la saison des pluies est en avance, c'est embêtant.

 

J56 mardi 12 octobre

Huancayo à Ayacucho en bus 300 km 8 heures

 

 

 

 

 

Journée de bus, par moments style salaire de la peur. La plus grande partie du trajet s'est faite sur chemin de terre non vraiment stabilisé le long d'une gorge. Pour nous mettre dan l'ambiance, au départ on nous annonce qu'il y eu un éboulement sur l'itinéraire et que si ce n'est pas dégagé, nous ferons le passage incriminé à pied et nous serons récupéré par un autre véhicule de l'autre côté. Mais lorsque plusieurs heures après nous arriverons sur les lieux, un bulldozer sera en train de terminer le travail de déblaiement; Le chauffeur est un virtuose du volant, il roule à une vitesse folle alors que la route a juste la largeur de son véhicule. Les roues doivent passer à quelques centimètres du vide, mais il ne ralentit pas. Dans les virages sans visibilité, il se contente d'un coup de klaxon. De cette façon, il se retrouve face à un énorme camion avec remorque, qui lui aussi ne chôme pas. Grands coups de frein des deux bolides qui s'arrêtent à un mètre l'un de l'autre.

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Alors commencent les grandes manœuvres de croisement. On recule sur une centaine de mètres, le bus se colle au centimètre près contre la muraille rocheuse et le croisement est effectué. On n'imagine pas l'un de ces véhicules sur ce chemin, alors le fait qu'ils puissent se croiser relève du miracle ou du mystère.

 

A treize heures, arrêt repas. Dans un minuscule village une Indienne propose pour 1 sol, à peu près vingt cinq centimes, quatre petites patates et un œuf dur. Comme nous sommes pas mal redescendus par rapport aux jours précédents, l'attaque en règle des minuscules moustiques reprend.

En deuxième partie de trajets nous parcourons d'immenses zones semi-désertiques, peuplées seulement ou presque de cactus géants. Nous sommes dans un véritable décor de film de cow-boys. A seize heures arrivée à Ayacucho, petite ville, très jolie et animée. 

Demain nous reprenons les vélos. Lorsque je regarde la carte du Pérou, nous avons  en avons effectué une bonne partie, dont 900 kilomètres en bus. D'ici à Cusco la distance est de 600 kilomètres, une bonne partie en terre avec au moins trois cols à plus de quatre mille mètres. Nous prévoyons d'arriver à Cusco le 21 octobre en effectuant la totalité à vélo. Nous verrons bien. 

J55 lundi 11 octobre

Junin Laoroya 58 km à vélo puis Huancayo en bus 118 km

 

Ce matin il fait froid, Jean a repris la tourista. Nous ne nous préparons pas très vite. L'altiplano est hostile, temps couvert. Nous déjeunons près du centre ville que nous n'avions pas vu hier. La cité s'étend sur une grande superficie. La voie de chemin de fer, uniquement pour le transport des matières minérales, passe au beau milieu de la ville. On dirait vraiment une voie ferrée qui vient et qui va nulle part.

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Vers dix heures nous roulons. Il fait froid, le vent se lève et de gros nuages gris se déchargent de temps en temps. Cependant la route est plate et le rythme est de l'ordre de vingt à l'heure.

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Nous voyons quelques vigognes, assez sauvages, que nous ne pouvons approcher à moins de trente mètres. Les vingt cinq derniers kilomètres sont en descente, le long d'un petit vallon tout en méandres. C'est très agréable. Après avoir mangé d'une excellente truite, nous sommes à Laroya à 14h30. Cette ville minière et métallurgique est impressionnante d'une part de part les immenses pans de montagnes multicolores qui l'enserrent et d'autre part du fait des installations industrielles qui mangent tout le fond fr vallée, avec comme fleuron une immense cheminée sinistre.

 

Un bus part pour Hancayo à 1h, après quelques discussion entre nous, nous le prenons. Nous  faisons attention aux bagages, dan la précipitation, l'expérience nous a montré ce qui pouvait arriver. Les vélos sont montés sur le toit. 15H départ, le début du voyage est fantastique, le long d'un profond vallon aux multiples roches multicolores qui affleurent. 17H30 arrivée, il pleut, la nuit n'est pas loin. Nous aprrenons que le terminal pour se rendre demain à Huanoco est ailleurs. Nous remontons nos montures  puis sous la pluie  nous prenons la direction de notre point de départde bus du lendemain. La nuit tombe, la pluie ne faiblit pas, le trafic est intense. Une jungle, heureusement pas de grande vitesse, mais le klaxon en permanence. Jean glisse et tombe sur un rail qui traverse la chaussée. UN hôtel, en première apparence glauque, mais finalement très bien. Ouf!

Je me renseigne sur le bus du lendemain. Gentiment l'hôtelier téléphone et me dit qu'il faut prendre las billet s ce soir. C'est reparti, il m'emmène en moto. Heureusement la pluie a cessé  Retour à l'hôtel à 19h30. Nous partons dîner dans un chinois excellent et ça change. Alain fête le fait d'être grand-père pour la seconde fois et le «burgogno» péruvien coule bien!

 

 

 

J54 dimanche 10 octobre

Cerro de Pasco à Junin 78 km

Ce matin nous ne nous sommes pas trop pressés, en effet à cette altitude nous avions peur d'avoir froid en partant de bonne heure. La température était basse, mais du fait du ciel couvert, le thermomètre restait au-dessus de zéro. Nous avons demandé notre chemin en direction de Junin. Nous espérions ne pas remonter à 4500 mètres, retrouver la route que nous avions laissée pour venir à Cerro de Pasco. Ce qui est extraordinaire, lorsqu'on pose une question concernant une direction à prendre, plusieurs personnes répondent mais les avis divergent. Les doigts pointent dans toutes les directions. Il y deux jours j'ai même eu droit à une réponse du style: à droite mais tout droit alors que la personne de la main indiquait la gauche!  Nous nous rendons à l'évidence , il nous faut faire les sept kilomètres qui vont nous ramener à l'intersection où nous avons bifurqué hier. 

Le temps est menaçant, de petites ondées font leur apparition. Nous sommes dans des régions qui peuvent rapidement devenir hostiles. Une fois être repassés par les 4500 mètres, une longue descente très douce va nous faire perdre quatre cents mètres en quatre vingt kilomètres. Notre étape se situe entièrement au-dessus de quatre mille mètres. La vue porte très loin. La luminosité est vive, malgré les train de nuages très sombres. La pluie ne doit pas être forte, car normalement la saison des pluies commence dans un mois au moins. Un indice nous rend optimiste, l'herbe est bien jaune, donc les précipitations sont encore faibles.  Cependant dans les fossés en bordure de chaussée, il y a des traces de neige, il doit donc bien y avoir quelques tempêtes.

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Nous roulons sur un immense plateau, entouré dans le lointain de montagnes pointues. L'ambiance est austère, un vent modéré mais froid souffle de travers, et de gros nuages sombres déversent au hasard sur cette immensité une petite pluie intermittente. Cependant nous gardons un bon rythme et vers quatorze heures nous touchons au but. La petite ville de Junin, ressemble à ces villes du far-west posées à même le bord de la route. La vie dans ces coins à plus de quatre mille mètres d'altitude ne doit pas être facile tous les jours. Nous trouvons un petit hôtel sympathique, aux chambres accueillantes et spacieuses. Seul  problème, indépendant de la bonne volonté de l'hôtelier, pas d'eau. En effet jusqu'à demain matin six heures, toute la ville est privée d'eau du fait de réparations. Bon, nous nous passerons de douche. D'ailleurs nous ne nous sentons pas très sales, d'une part la route est bien asphaltée, donc pas de nuages de poussière, et d'autre part la température pas très élevée limite la  transpiration.

Une fois nos affaires déposées, une petite truite de très bonne qualité nous est servie dans un bouiboui qui ne paye pas de mine. Mais comme toujours la nourriture est très bonne.

Nous repartons dans nos discussions quant à l'orientation à donner à notre voyage. Vu notre vitesse de progression, je suis partisan de prendre le bus sur une bonne distance. En effet, à ce train je pense que nous ne serons pas à Cusco avant fin octobre. Or le reste du programme est très chargé, traversée de deux parcs nationaux en montagne, l'un en Bolivie, et l'autre au Chili. Après ces deux visites qui à mon sens prendront une dizaine de jours, le plat de résistance, traversée de deux salars Coipasi et Uyuni en Bolivie, puis traversée du désert du sud Lipez avec une ascension du Licancabur, sommet de presque 6000 mètres, pour arriver à San Pedro de Atacama, ville à partir de laquelle je compte rejoindre la capitale du Chili en bus. En ce qui me concerne je ne dois pas oublier que j'ai un avion à prendre le 10 décembre au plus tard à Santiago. Tout cela me semble bien dense pour 60 jours. En effet le vélo ça prend du temps, surtout lorsqu'on passe de nombreux cols entre quatre et cinq mille mètres, et que l'on pousse son vélo sur des pistes! Les décisions que nous allons prendre détermineront de l'orientation que je donnerais à ma participation, car je ne veux pas m'engager dans les déserts de Bolivie à vélo après le cinq novembre,cela deviendrait une course rangée contre le temps pour arriver dans les délais à Santiago.

 

J53 samedi 9 octobre

  Huariaca à Cerro de Pasca (4320 m)  53 km

 

Cela paraît peu 53 kilomètres, mais il y avait 48 kilomètres de montée. Une rampe interminable, de plus le temps pas très beau, la pluie menaçait. Et puis en haut de cette côte , certes régulière mais qui nous a demandé cinq heures, nous avons vu surgir sur un plateau à 4320 mètres une ville de 15 000 habitants, qui nous accueille avec un panneau: LA VILLE LA PLUS HAUTE DU MONDE. Pourquoi tant de monde, tout simplememt du fait des différentes mines en exploitation dans cette région haut perchée.

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 Effectivememt la vie est grouillante. De plus des fêtes musicales sont organisées en ce moment. Alors que nous cherchions un hôtel, j'étais grelottant, et j'ai bien cru qu'il n'y aurait plus de place. A la troisième tentative, on nous a proposé deux chambres pour trois, nous n'avons pas hésité. Seule la chambre individuelle a la douche, donc les deux punis n'ont pas droit ni à une serviette ni à une bouilloire. En effet ici on ne chauffe pas, et le soir il y a distribution de bouilloires.

 

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Ville étonnante, on a vraimemt l'impression d'être très loin, une espèce de far-west des montagnes. Demain nous n'allons pas partir très tôt, en effet il risque de faire très froid.

Merci pour vos messages d'encouragememt, car parfois je me demande ce que je fais là, tout particulièrement le soir, la nuit tombant très vite. Dans les villes l'ambiance devient vite glauque, alors que dans les villages au contraire cela reste très sympa, même si parfois les conditions y sont beaucoup plus spartiates. 

Pour Cusco il nous reste un bon morceau et je crains que deux semaines ne soit une estimation optimiste, nous verrons bien. En tout cas ce que nous mamgeons dans les restaurants, même les plus simples est toujours de qualité et servi en quantité, bon pour le moral.

 

 

 

 J52 vendredi 8 octobre

Huanauco (1910m) à Huariaca (3050m) 70 km

 

Après une nuit bruyante et un petit déjeuner consistant à base  de gâteaux bien sucrés dans une pâtisserie, bien entendu à la mode sud américaine, boucan d'enfer entre les voitures et autres engins à moteur d'une part et la radio à fond la caisse d'autre part, nous prenons la route vers 8h30. Le topo que nous a fourni l'Allemand rencontré quelques jours précédemment nous annonce des dénivelés très importants. Cette information se révélera fausse. Donc nous quittons la ville en pensant avoir une journée très dure.  Sur les routes péruviennes il y a beaucoup de travaux d'une part d'entretien et d'autre part de réfection. Dans ce deuxième cas, cela occasionne des ralentissements importants du fait de la circulation alternée. Au cours des arrêts nous discutons avec les chauffeurs de toutes sortes d'engins bloqués comme nous. C'est comme cela que je me retrouve aux commandes d'un rick show.

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 Nous sommes durant ces haltes forcées attaqués par des petits insectes très piquants, qui me font penser aux horribles medjes écossaises. En nous enduisant de produit répulsif, qui sent très mauvais, cela les freine.  Nous remontons une immense vallée en pente douce. Un vent arrière nous aide et le trajet se transforme en partie de plaisir. En chemin un gamin à vélo nous accompagne quelques kilomètres. Son vélo est vraiment grand pour lui. Il me fait peur, car il roule complètement à gauche, et que de gros engins déboulent de temps à autre. Ce qui préoccupe souvent les Péruviens, outre notre nationalité, c'est le prix de nos montures. Nous éludons systématiquement la question, refusant d'annoncer un prix, qui pourrait leur paraître faramineux. Vers midi arrêt dans un petit restaurant à San Rafael, où comme d'habitude nous déjeunons fort bien d'une bonne soupe et d'une assiette de viande servie avec de riz,  le tout accompagné d'une boisson indéfinie à base d'herbes, fort bonne et légèrement tiède, suivi d'un bon café en finale. Et cela pour un coût défiant toute concurrence, l'équivalent d' 1,20 euro par personne. Manger au restaurant au Pérou revient beaucoup moins cher (et c'est bien plus agréable et bien meilleur) que de s'acheter des produits manufacturés genre boîte de thon, fromage, petits gâteaux et coca-cola que l'on mange sur le bord de la chaussée.

 

Vers 15h nous atteignons notre but. Les mille et quelques mètres de dénivelé nous ne les avons pas sentis, sans doute le tracé impeccable de la route et le  vent favorable sont les éléments essentiels de cette facilité éprouvée. Un superbe hôtel, très agréable et pratique pour les vélos nous accueille, ce qui est très bon pour le moral.

Nous allons avoir une longue discussion sur la suite de l'itinéraire. D'ici Cusco, il ne semble pas y avoir de problème, même si les difficultés sont bien réelles le chemin ne laisse guère d'initiative. La question se posera cependant de savoir si pour gagner du temps nous n'effectuerons pas une partie en bus. Nous sommes tous trois d'accord pour trouver que ce serait dommage, si l'itinéraire continue d'être aussi attrayant que ce que nous avons connu depuis maintenant 600 ou 700 kilomètres. Par contre la suite, après la frontière bolivienne, ne semble pas de la tarte, en particulier la traversée des salars boliviens, itinéraire qui doit nous conduire à San Pedro de Atacama au Chili. Une estimation optimiste pour notre arrivée dans cette ville se situe autour du vingt novembre. En ce qui me concerne ma date butée se situe le 10 décembre à Santiago, où je dois prendre l'avion.  Nous aurons l'occasion de faire un premier point intermédiaire à Cusco. Mais le «timing» me semble serré. Il est étonnant de partir pour un voyage de presque quatre mois, s'imaginant que c'est long, et de passer son temps justement à courir après le temps pour ne pas prendre de retard. C'est là que l'on se rend que l'Amérique du Sud c'est gigantesque.

 

J51 jeudi 7 octobre

Chavinillo(3500 m) à Huanuco (1910 m)  73 km

Après une assez bonne nuit, bien que nous soyons entassés tous les trois dans une chambre, nous allons déjeuner dans un local du village. Il ne fait pas chaud, nombreux sont ceux qui portent un bonnet. Le ciel est couvert, contrairement aux jours précédents il n'a pas plu hier soir, ce qui explique peut-être la présence de cet épais manteau nuageux.

 

A huit heures quinze nous roulons. Nous pensions avoir à effectuer une courte montée, mais pas 15 kilomètres. En fait la route passe à près de 4100 mètres d'altitude. Comme mise en jambe ce n'est pas mal. La vue est splendide. Lorsque nous arrivons en fin de montée nous découvrons un village tout en longueur. Nous nous y arrêtons boire un café dans une épicerie. Nous n'avons ps bien chaud. On nous installe trois chaises et nous consommons nos boissons chaudes parmi les clients qui viennent faire leurs emplettes. Deux anciens à la peau bien cuivrée se sont déjà mis le compte, bien qu'il ne soit pas onze heures. Nous sommes incapables de distinguer s'ils nous parlent en castillan ou en quechua!

 

Enfin la descente, elle nous conduira jusqu'à Huanuco, c'est à dire que nous n'aurons quasiment pas à pédaler durant plus de cinquante cinq kilomètres! Durant cette étape nous étions dans le Pérou profond. A midi, nous nous arrêtons dans un petit restaurant , comme nous le faisons souvent. Il fait aussi débit de pétrole à partir de gros fûts entreposés dans la salle à manger. Nous nous installons le plus lin possible de ces récipients, car l'odeur de gasoil est très présente. Un chien vient quémander, puis un chat et enfin un petit cochon. Tout ce petit monde fait bon ménage sous la table.

Enfin vers 14heures nous atteignons notre but. Il fait très chaud, plus rien à voir avec l'atmosphère des jours derniers. La ville est bien dans la tradition sud américaine, très bruyante. Et comme si cela ne suffisait pas, les restaurants n'ont pas de porte, mais un rideau métallique qui reste grand ouvert. Les bruits et odeurs des véhicules de tous types s'y engouffrent. Non seulement ils ne sont pas avares concernant le klaxon, mais de plus systématiquement il y a une télé qui braille. C'est très pénible.

 

 

 

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J50 mercredi 6 octobre

La Union à Chavinillo 68 km

Ce matin il faut beau, la ville a l'air plus riant que la veille sous la pluie. Départ à huit heures quinze. La route est goudronnée, ce qui est appréciable, alors que ma carte ne le mentionnait pas. Quelques chiens vont aboyer sur notre passage, mais sans vraiment se lancer dans de grandes poursuites. Concernant les deux attaques sur les sacoches d'Alain, hier après-midi, il a constaté que l'une d'elles était trouée. Manifestement le chien a serré fort! L'étape de ce jour est magnifique. Elle se déroule sur de grands flancs de montagnes , qui dominent des gorges encaissées. L'altitude sera en permanence entre trois mille et trois mille sept cents mètres; la circulation sera peu dense. C'est le type même d'itinéraire complètement adapté au vélo. Comme souvent, vers les treize heures nous tombons sur un petit restaurant au sein d'un petit village. Nous avons droit au traditionnel poulet riz. Mais cela passe bien et je ne m'en lasse pas. De plus le riz constitue l'aliment idéal pour les gros efforts prolongés. Nous repartons vers les treize heures trente pour les seize derniers kilomètres, dont quatorze de montée. Vers les quinze heures nous arrivons dans le pittoresque village de Chavinillo. Il est tout en longueur, situé à mi-pente d'un grand flan de montagne. L'atmosphère y est  très . De plus le temps contrairement aux jours précédents, la pluie ne semble pas venir. Nous allons avoir des difficultés pour nous loger, car du fait des élections, les différents hôtels affichent complets. Nous réussissons à obtenir une chambre pour trois. Nos avons franchi ce jour le cap des deux mille kilomètres à vélo depuis notre arrivée en Amérique du Sud.

J49 mardi 5 octobre

Pachapaqui à La Union par col de Yanashalla (4720 m)

 

La nuit a été très bonne dans notre chambre à trois. Avec Alain nous avons dormi dans le même lit, et ne nous sommes absolument pas gênés.

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La pluie qui à la tombée de la nuit était assez forte, dès 21h a laissé la place à un ciel parfaitement clair constellé d'étoiles. Mais je n'ai toujours pas réussi à voir à nouveau la Croix du Sud. Petit déjeuner à 7h chez les routiers. Ce matin le petit local semble envahi par les travailleurs de la DDE. Ils sont aussi sympathiques que les routiers. Le soleil entre dans le lieu et nous réchauffe. Hélas, un énorme camion vient se garer et l'ombre reprend ses droits. A huit heures nous roulons. Le soleil nous réchauffe et la température monte très vite, bien que nous soyons à 4000 mètres. La route en pente modérée s'enfonce dans un immense vallon dominé de belles montagnes, qui doivent voisiner avec les 5500 mètres. La montée est agréable, à part les chiens de bergers qui viennent nous agacer. A un moment je suis aux prises avec quatre bestiaux, dont deux sont particulièrement agressifs. Ils essaient de m'attaquer par plusieurs côtés à la fois. Un énorme camion se pointe. Le chauffeur, averti de la situation par Jean, qui assiste au spectacle d'un peu plus bas, déclenche son klaxon très puissant. Les chiens sont manifestement déstabilisés et mon sauveur m'adresse un grand sourire. Très souvent les chauffeurs nous font de grands gestes d'encouragement. En un peu moins de trois heures et vingt deux kilomètres nous sommes au col à 4720 mètres Nous n'avons pas trouvé cette montée difficile, même pas essoufflés ou si peu. Il faut dire que tout le long de la montée avec Alain nous avons discuté poissons et régions de France que nous aimons. Un comble au milieu des Andes! Lorsque nous comparons avec les cols équatoriens, cela nous a semblé une promenade de santé. Pourvu que cela dure. Du sommet, une fois habillés nous nous lançons dans une longue descente de vingt huit kilomètres, et arrivons à l'adorable petite ville de Huallanca, où nous déjeunons. Le propriétaire du restaurant chasse un gamin qui se rapproche un peu près de nos vélos. La technique de vol semble de bien rodée: se montrer, afin de mettre en confiance tout en guettant le moment d'inattention pour s'emparer d'un objet ou d'un sac. Nous repartons vers les 14 heures, en direction de La Union. Tout le monde nous dit que c'est un coupe-gorge, enfin nous verrons, nous surveillerons nos bagages. Il faut dire qu'à vélo avec ces nombreux paquets que nous trimbalons à vitesse réduite, nous sommes facilement détectables et suscitons des convoitises. Sur les vingt kilomètres de cette dernière portion de l'étape du jour, les chiens sont bien présents. A deux reprises Alain est freiné par des crocs plantés dans ses sacoches. Nous arrivons juste au moment où la pluie fait son apparition, comme tous les jours. Il n'est que trois heures et demie. Effectivement la ville n'inspire pas. Elle est toute en longueur, enserrée entre deux chaîne de montagnes pelées. Il s'en dégage une certaine austérité. De nombreux jeunes nous dévisagent. Nous faisons le tour des hôtels, c'est un peu glauque. Certains n'ont pas de toilettes! Nous nous décidons pour un établissement, qui ne donne pas vraiment confiance, mais il faut bien prendre une décision. Jean dira « ce soir on ne va peut-être pas aller manger tous ensemble». Il y a des douches, mais froides. Bien que ce soit le troisième soir sans me laver, je n'arrive pas à me glisser sous cette eau gelée et pare au strict, strict minimum. En tout cas, malgré les petites turpitudes, auxquelles nous nous habituons, l'étape de ce jour était formidable. Si les mille kilomètres qui nous séparent de Cusco sont du même acabit, nous avons encore de beaux moments en perspective. A dix huit heures alors que je finis de taper mon ptit compte-rendu journalier, en regardant par la fenêtre (ce qui est déjà bien pour une chambre d'hôtel, car souvent elles n'en ont pas), je constate qu'il fait pratiquement nuit du fait de l'épaisseur des nuages, et la pluie tambourine sur les toits en tôle.

 

J48 lundi 4 octobre

bivouac (3970) à Pachapaqui (3950) 54 km

Nous avons attendu que le soleil touche les tentes pour sortir. Tout était couvert de givre, l'eau et le coca étaient de gros glaçons.

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Mais dès que les rayons chauds sont arrivés, la température est devenue immédiatement clémente. Le temps que tout notre matériel soit sec, il était 9h20. Les paysages qui nous entourent sont extraordinaires. Dans le lointain à une cinquantaine de kilomètres la masse imposante du Huscaran est très visible. Ce matin toujours un petit vent défavorable jusqu'au village de Conococha qui se situe vers les 4000 mètres d'altitude. Il n'y fait pas chaud du fait des courants d'air. Après y avoir bu un café, nous reprenons notre route en prenant une direction différente, ce qui nous permet d'avoir un vent favorable. Avec la côte, les bagages et l'altitude cela fait une sacrée différence. Nous franchissons un col à plus de 4200 mètres puis effectuons une longue descente jusqu'à 3600 mètres. Nous avons tout loisir sur ce nouveau versant d'admirer d'autres grandes montagnes couvertes de glaciers. Halte pique-nique, il faut une trentaine de degrés et nous cuisons presque. Je me suis acheté un grand chapeau pour remplacer le bob qui m'a été dérobé et il m'est bien utile sous ce soleil de plomb. L'amplitude thermique entre le jour et la nuit est vraiment importante, de l'ordre de 40 degrés. Encore une dizaine de kilomètres et 300 mètres de dénivelé, que nous sentons à peine, et nous arrivons à Pachapaqui, petit village logé dans un magnifique cirque montagneux à la teinte ocre du fait de l'herbe. L'unique hébergement du lieu nous propose une chambre à deux lits pour trois. Cela nous paraît royal comparativement à la nuit précédente. Nous sommes d'autant plus contents de nous trouver à l'abri que ce soir une pluie assez forte se met à tomber. Nous dînons dans un routier local, petite pièce avec quelques tables. Devant d'énormes camions stationnent et les chauffeurs se restaurent, certains d'entre eux vont sans doute ensuite rouler toute la nuit. Leurs engins sont impressionnants souvent neufs et propres, trois essieux et douze roues à l'arrière. Nous mangeons très correctement comme toujours depuis que nous sommes en Amérique du Sud. La soupe est indéterminée, une espèce de gelée violet clair, un goût sucré et une consistance un peu gélatineuse. Quel étouffe chrétien! Je n'arrive pas au bout de mon assiette.

 

 

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J47 dimanche 3 octobre

Huaraz(3053m) à bivouac (3970 m) 14 km avant Conococha 69km de route

Nous partons tardivement, 9h30, toujours une multitude de choses à faire. Avant le départ, un dernier coup d'œil du toit de l'hôtel sur la Cordillère Blanche. La route monte doucement mais sûrement. Nous subissons de plus un léger vent défavorable. Vers 13h, nous n'avons effectué que 37 kilomètres, nous nous arrêtons dans un petit retaillant, où comme d'habitude nous avons droit à une bonne platée de riz. Cela tient bien au ventre, ce qui est idéal pour les trajets difficiles à vélo. Après un arrêt d'une heure, la reprise dure; nous arrivons rapidement vers les 4000 mètres et nous évoluons sur le terrain type altiplano. Une grand lande ondulante couverte d'herbes, et en arrière-plan de grands sommets enneigés. A 16h30, nous décidons de nous arrêter et nous préparons au bivouac. Nous nous abritons de la vue de la route derrière une petite butte à proximité d'une rivière; l'endroit est superbe et de plus très plat, ce qui permet d'installer confortablement nos deux tentes. Depuis que j'ai pu me racheter, lampe frontale, couteau, couverts, appareil photos et autres objets, je n'ai plus l'impression d'être le SDF à qui il faut tout prêter. La nuit arrive rapidement et à 19h nous disparaissons dans nos abris pour une longue station allongée. La température va descendre progressivement jusqu'en dessous de -10.

 

 

J46 samedi 2 octobre

Caraz à Huaraz via Yungay 72 km de route

Nous reprenons la route après un arrêt de trois jours. Les grands cols des Andes sont devant nous et nous n'allons pas tarder à attaquer le premier qui passe à 4700 mètres. La ville de Caraz se situe à 2200 mètres d'altitude et Huaraz à 3090. Nous partons de bonne heure, 7h15, et laissons l'hôtel Chavin et ses propriétaires sympathiques et très serviables. Sur notre route se trouve Yungay, cette ville détruite par une immense coulée venant du Huscaran lors du tremblement de terre de 1970. Nous nous arrêtons sur le site. Sur l'ancien emplacement de la ville a été aménagé un immense sanctuaire, planté de fleurs sur les décombres de la ville que l'on a laissés après la catastrophe. En effet la coulée a recouvert une ville de plusieurs milliers d'habitants, et les autorités ont décidé de ne pas déblayer les personnes et les bâtiments enfouis. On se promène dans une grande allée centrale qui conduit à l'emplacement de la place centrale de la ville. La cathédrale, seul bâtiment au milieu de ce vaste jardin, a été reconstruite à l'identique. Il est étrange d'imaginer que sous nos pieds, une ville a été engloutie en quelques secondes par une gigantesque avalanche venant du Huscaran, qui nous domine du haut de ses 6700 mètres Il a sur ce versant, des airs de Mont Blanc vu de Chamonix, avec l'immensité en plus. En effet Chamonix, 1200 mètres, le Mont Blanc 4810, Yungay 2500 et le Huscaran plus de 6700. Il domine donc la ville de plus de 4000 mètres. Après cette visite émouvante sur les lieux de ce drame nous poursuivons en direction de Huaraz, qui tient un peu lieu de Chamonix péruvien. Bonne surprise, alors que nous avions eu de mauvaises indications quant à la longueur de l'étape du jour, avec joie nous arrivons 30 kilomètres avant ce que nous pensions. Notre heure d'arrivée vers les deux heures trente, va nous laisser tout loisir de vaquer à nos occupations. En ce qui me concerne, priorité numéro une: me racheter une veste de montagne pour remplacer celle qui m'a été volée. Je trouve un équipement gortex qui me va à ravir et qui semble offrir toutes las garanties d'efficacité contre la pluie et le froid. Ensuite je procède avec Alain, au remplacement de ma chaîne de vélo. En effet depuis Quito nous avons effectué à peu près 1800 km sur nos montures, souvent dans des conditions difficiles, qui ont fortement éprouvées la mécanique. Les pistes en terre sont tout particulièrement abrasives pour les chaînes et les pignons. La mienne commençait à présenter des signes d'usure inquiétants. Elle a moins de 3000,kilomètres, alors qu'au moins de juin j'ai changé ma chaîne en vue de ce périple, elle avait effectué plus de 8000 kilomètres et fonctionnait toujours très bien. Cela prouve que les conditions que nous rencontrons sur les routes d'Amérique du Sud sont plus difficiles que celles rencontrées sur les routes européennes.

 

J45 vendredi 1 octobre

Caraz

La nuit n'est pas très bonne, mélange de fatigue et d'interrogations. En effet, malgré les choses fabuleuses que nous avons faites et vues, j'ai la sensation de m'éloigner du projet pour lequel je me suis engagé, Quito Santiago à vélo. Lorsque je fais le décompte des jours, je trouve que nous avons passé la moitié de notre temps à des activités autres que pédaler vers Santiago. Le parcours me paraît déjà tellement long, que de me disperser, entre problèmes techniques, attente et activités certes intéressantes mais annexes, entame ma motivation et me plonge dans un certain état de malaise. Jusqu'à présent les voyages à vélo que j'ai effectués étaient rondement menés, axés presque uniquement sur le fait de pédaler. Les autre activités nécessitant du temps,je les vis un peu comme une entrave au projet. Je sais que si je n'adhère pas j'ai tout loisir de m'arrêter et rentrer à la maison. Voilà, j'ai un peu de vague à l'âme. Ce matin je suis même allé me renseigner sur les vols Cusco Lyon, de fois que je décide d'arrêter mon voyage dans cette ville.

Aujourd'hui, repos, nous avons quelques traces de notre balade éclair. En ce qui me concerne, outre quelques courbatures, un début de sciatique me tire la fesse droite. Mais je ne pense pas que le vélo amplifiera la douleur. Alain a récupéré par le chauffeur d'un colectivo son guide Pérou Bolivie et sa méthode d'espagnol. La mienne a disparu, comme un certain nombre d'autres choses dans le sac qui s'est envolé à Trujillo. Mais comme vient de me l'écrire mon fils, il ne me reste qu'à appliquer la devise que je lui ai enseignée: si tu perds quelque chose tu t'en passes.

 

J44 mercredi 30 septembre

deuxième partie du trek

Durant la nuit les nuages s'estompent laissant la place à un ciel peu clair, laissant voir cependant quelques étoiles; vraiment tout est différent de ce que l'on peut voir dans l'hémisphère nord. Moi qui suis souvent le nez en l'air la nuit à chercher les différentes constellations, les planètes ou à essayer de repérer les satellites, j'ai l'impression devant ce ciel inconnu de me trouver sur une autre planète.

Lever six heures, nous déjeunons en pliant et à 6h45 nous sommes en route. Nous remplissons nos bouteilles au torrent, grossi par les pluies d'orage. L'eau est trouble, nous doublons la dose de pastilles purifiantes. Une course va s'engager pour essayer de rejoindre avant seize heures le village de Vaqueria à 3700mètres d'altitude et distant d'une trentaine de kilomètres en passant par un col à 4750 mètres. Le rythme est bon. Le chemin monte régulièrement au début. Un vaste cirque montagneux se découvre. Nous sommes entourés de montagnes qui se situent toutes entre 5800 et 6200 mètres. Le spectacle est majestueux, mais l'effort fourni dans cette longue vallée ennuyeuse hier pour y parvenir est bien réel. A 9heures30 le col est atteint. Il fait bon Nous mangeons quelques provisions et nous lançons dans la course vers Vaqueria. L'extrait de carte que je possède annonce 7 heures pour atteindre notre but, mais cela dans le cadre d'un circuit de quatre jours. Attention cependant de ne pas se fouler un pied dans ce chemin très accidenté par endroits. Je pense surtout à Jean et Alain qui portent les deux plus grosses charges. Nous passons le point de bivouac de Cachinpampa avec du retard sur l'horaire. Notre espoir d'attraper le dernier «colectivo» ou transport en commun semble s'envoler. Mais après avoir fait une petite halte et rempli nos gourdes dans un ruisseau qui collecte les crottes d'animaux, nous repartons. Nous arrivons au point de contrôle du parc du Huscaran et nous constatons que nous avons repris un peu d'avance. Je dois préciser que hier matin au démarrage, nous avons payé de l'ordre de 20 euros chacun pour commencer notre randonnée et un ticket confirmant notre payement nous a été délivré. Sur ce billet figurent le nom et le numéro de passeport. Nous traversons des zones habitées. Les gamins, pour la première fois, depuis que nous sommes au Pérou nous réclament quelque chose. Mais notre train ne nous laisse pas vraiment le temps de leur répondre. Devant nous, l'ultime remontée pour atteindre le village. Par différentes rampes, nous l'atteignons vers 15heures40. Là il nous est confirmé qu'un colectivo passera vers 16 heures, mais l'horaire nous dit-on est fluctuant; mais pas de souci nous pouvons patienter en toute sécurité. Nous buvons une bière. L'heure prévue est dépassée depuis longtemps, mais à nos questions il nous est répondu de ne pas s'alarmer. Après 16h30, un gros camion avec une benne type bétaillère à ciel ouvert s'arrête. On nous invite à y monter, en nous précisant que c'est le colectivo. Le chauffeur nous ouvre la haute porte arrière et nous rejoignons dans un espace de poussière les trois Indiens blottis au fond derrière la cabine. Durant trois heures nous allons vivre une expérience unique en étant secoués de manière invraisemblable le long d'une piste qui passe au milieu d'un univers de pics totalement féeriques. Nous passerons un col à 4800 mètres. La longue montée vers ce col nous ouvre un espace d'une beauté infinie. Les Indiens sont particulièrement accueillants. A part les deux hommes et la femme assis avec nous au fond de cet enclos en bois que constitue la remorque, deux Indiennes et un Indien sont assis en hauteur à hauteur de la cabine. Une fois le point haut atteint, je pense que le panorama extraordinaire, qui nous surplombait durant cette heure de montée, allait disparaître. En effet en plongeant sur l'autre versant tout a changé. De magnifique le paysage est devenu franchement stupéfiant. Je n'ai jamais rien vu de tel dans ma vie. Surtout le soir lorsque la lumière oblique donne des teintes presque irréelles. Le Huscaran s'est découvert jaillissant, masse sombre par le rocher et éclatante par la glace. Il nous dominait de ses 6700 mètres, dégageant une impression de sauvagerie indomptable, montagne envoûtante. Face à cette masse énorme jaillissant tout en puissance massive, le Nevad Huandoy, s'élevant lui aussi à plus de 6000 mètres déploie au soleil couchant ses immenses draperies glacées sur des pentes d'une raideur à couper le souffle. En effet, du fait des conditions climatiques différentes de celles de l'Europe et de l'Asie, la neige tient sur des pentes plus raides que dans les autres massifs montagneux. Il en résulte ces formations de neige et de glace qui s'élancent dans le ciel, défi à la gravitation. Les Indiens s'excitent un peu à ce spectacle et l'un d'eux me demande mon appareil photos et fait une série de photos magnifiques. En effet, il se tient mieux en équilibre dans cette remorque, alors que nous descendons à toute vitesse un chemin mal pavé. Les deux indiennes en hauteur avec le froid de la nuit qui vient nous rejoignent dans la benne. L'une est institutrice dans un village éloigné et fait ce trajet chaque semaine. La nuit tombe complètement. Nous nous enfonçons dans une gorge, surplombée d'immenses parois rocheuses verticales. Que le site est sauvage. Le trajet durera 3 heures et nous roulerons à mon avis de l'ordre de 80 à 100 kilomètres. Vers les 19h45 nous arrivons à la ville de Yungay, qui a la sinistre particularité d'avoir été complètement détruite lors du tremblement de terre de 1970. En effet un immense pan du Huscaran , glace, boue et roche, avait déferlé sur la ville. Cette vague minérale avait mis deux minutes pour atteindre la cité et ensevelir ses 20 000 habitants. Le lieu a été conservé en l'état et constitue un immense cimetière commémorant les victimes du drames. Nous y repasserons en vélo lorsque nous reprendrons itinéraire vers le sud. Nous disons au-revoir aux Indiens qui éclatent de rire,en constant qu'une Indienne à qui j'avais prêté mon Kway, par étourderie et pas intentionnellement, oublie de me le rendre en descendant. Au terminal de la ville un colectivo plus classique nous ramène à Caraz. Expérience de deux jours conduite à l'arrache. Arrivés sur la «Plaza des Armas» une fois de plus la campagne électorale bat son plein. Un bruit infernal monte d'un stand monté sur lequel, un orateur surexcité hurle de façon hystérique et invraisemblable devant une petite foule d'Indiens. Les Indiennes sont habillées de façon traditionnelle, avec de grands chapeaux et des vêtements de couleurs vives. En longeant la place, alors que je me bouche les oreilles, un feu d'artifice explose juste au-dessus de nous et je crains de recevoir quelques boules incandescentes. L'Amérique du Sud ça vit! Une fois posées nos affaires nous allons dîner en retraversant la place à l'agitation de folie.

 

J43 mardi 29 septembre

première partie du trek

5h30 petit déjeuner, 6h le taxi nous prend. C 'est une vieille bagnole déglingue. Le chauffeur commence par faire le plein et gonfler un pneu arrière, oui un seul. Puis nous partons pour le village de Cashapampa, à 2900 mètres d'altitude, par une piste chaotique. Le trajet dure une heure. Une fois sur place nous essayons de louer un muletier car deux d e nos sacs sont lourds, celui de Jean particulièrement. Mais nos espoirs sont déçus. En effet trouver à sept heures du matin dans un village endormi quelqu'un pour une balade de plusieurs jours, car le muletier doit revenir, est mission improbable voire impossible. Les mules se sera nous. Nous voilà partis le long d'un vallon monotone d'une longueur quasi-infinie nous doublons vers les treize heures le premier point d'arrêt habituel à 3850 mètres. Nous espérons pousser jusqu'au suivant à4250 mètres , afin de nous positionner au mieux pour passer le lendemain au plus tôt le col de Punta Union à 4750 mètres. Cette vallée est vraiment sans fin et d'une grande monotonie, ressemblant un peu à certaines vallées de l'Oisans, mais sans pratiquement aucune vue sur les sommets et puis beaucoup, beaucoup plus longue. Vers les seize heures après avoir longé un grand lac et traversé le très long plat qui lui fait suite, enfin quelques sommets nous apparaissent. Ils sont plongés dans les nuages et la pluie se met de la partie. Au pied de la côte qui fait suite, un bâtiment toilettes, mis en place pour les trekkeurs est le seul abri que nous trouvons. Nous nous y installons entre excréments et trou bien plein servant de réceptacle. La position est loin d'être confortable, mais au moins le toit en tôle de cette infrastructure circulaire nous protège. Étant humide, je commence à prendre froid, bien que la température reste clémente. Nous sommes à 4000 mètres et le soir arrive. De plus je n'ai pas de veste de montagne, la mienne étant partie avec le sac que l'on m'a volé la semaine dernière. Je pense pouvoir en racheter une lors de notre étape prochaine dans la ville de Huaraz, grande ville touristique, lieu de départ de balades dans la Cordillère. Enfin une accalmie toute relative, nous montons nos deux tentes. Nous faisons un feu qui finit par prendre, malgré la forte humidité du bois. Je dois dire que la tournure des choses ne me plaît pas vraiment. Nous passerons une nuit assez confortable, malgré l'altitude. En effet à partir de 4000 mètres en position couchée, je ressens une sorte de malaise désagréable. Cette sensation je l'avais déjà éprouvée il y a trois ans dans l'Himalaya, lorsque j'avais fait le tour des Annapurna.

 

 

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J42 lundi 28 septembre

Huallanca à Caraz 41 km dont 20 de piste

L'hôtel a un nom bien adapté au lieu « Canyon del Pato», car ce sont les gorges que nous remontons. Nous y avons passé un excellent moment. Des petites chambres individuelles, magnifiquement ordonnées, avec des couleurs chatoyantes. Aujourd'hui nous allons parcourir la seconde partie du canyon, avec ses 35 tunnels. Tous les guides décrivent cette section comme magnifique et à ne pas manquer. Oui c'est joli et impressionnant par endroits du fait de l'encaissement et des à-pics sur la rivière dans certains endroits très étroits. Mais la couleur générale est terne, ocre clair, les faces rocheuses semblent délitées et herbeuses, le panorama est restreint. Par contre hier, nous étions dans une vallée moins resserrée, mais les montagnes qui nous entouraient semblaient se perdre dans le ciel quelques kilomètres plus haut. Les couleurs de la roche s'étalaient sur toute une gamme du noir au jaune en passant par le vert. Non, à mon goût personnel l'étape de la veille était plus grandiose.

Donc après un petit-déjeuner agréable en compagnie de Reiner, l'Allemand de Düsseldorf rencontré hier nous prenons la route sans nous presser vers les dix heures l'étape n'étant pas très longue et le dénivelé de 800 mètres. Avant de partir Alain jette un coup d'œil à ma chaîne qui me procure quels soucis. En effet sur le plateau du milieu, elle ne tient pas sur les pignons et saute. Il faut dire que depuis notre départ le matériel a été particulièrement éprouvé entre côtes en cailloux à plus de dix pour cent et bain de boue et de sable. L'étape se passe sans problème. Cependant, il faut faire attention lorsqu'on s'engage dans un tunnel de ne pas se trouver face à un bus, qui roule vite, avec une visibilité nulle, et des espaces avec les parois rocheuses de quelques dizaines de centimètres. A la halte pique-nique de midi nous tombons sur une famille costaricaine. Ils parlent tous bien le français. Le fils a habité quelques mois rue Bugeaud à Lyon, tout près de chez mes parents. Le monde est petit. Avec satisfaction nous voyons arriver le goudron après vingt kilomètres. On a l'impression de se mettre à voler et cette sensation si agréable qui me pousse à faire du voyage à vélo est au rendez-vous et j'appuie comme un sourd sur les pédales et me sens griser par des vitesses de trente à l'heure.

La ville dans laquelle nous arrivons est très animée et nous nous installons dans un agréable hôtel sur la « Plaza des armas», qui correspond toujours au centre de la ville. Le soir repas dans un restaurant en compagnie de Reiner et une autre Allemande lançée dans un périple de 9 mois en Amérique du Sud. Elle compte rentre en mai pour les 0 ans de son père.

Nous organisons à l'arraché le programme des deux jours à venir. Le trekking de Santa Cruz, normalement prévu sur 4 jours. Nous comptons en mettre que deux. Je ne suis pas très fana de ces plans montés, comme je le dis à l'arrache. On loue, par chance sur information à neuf heures du soir, un sac à dos, on complète avec mon North face, sac de voyage à bretelles de gros volume, mais pas sac à dos et le petit sac d'Alain. On achète de la nourriture au marché ouvert très tard. Par l'intermédiaire de l'hôtelier on réserve un taxi qui nous prendra à 6heures et c'est parti.

 

J41 dimanche 27 septembre

Chuquicara Huallanca 69 km de piste

Après une nuit tranquille au cours de laquelle à plusieurs reprises je suis sorti dans l'espoir, déçu, de voir la Croix du Sud nous reprenons la route à huit heures. Le macadam s'arrête après quatre cents mètres et la piste n'est pas bonne du tout, pierreuse et sableuse avec de la tôle ondulée. Les fesse vont en pâtir. Mais malgré tout cet itinéraire est emprunté par des véhicules, certes pas très nombreux, mais souvent de gros gabarit, cars et camions. Nous évoluons parfois dans des nuages de poussière. Le panorama devient grandiose car la rivière que nous suivons s'insinue entre la Cordillère Blanche et la Noire. Les sommets qui nous entourent et que nous ne voyons pas cachés par leurs contreforts culminent pour certains d'entre eux à plus de 6000 mètres. Des noms de montagnes prestigieuses, comme le Huscaran, l'Aplamayo me remémorent les nombreux livres que j'ai lus sur les Andes. A un détour du chemin une pyramide de neige se dévoile juste un instant avant d'être à nouveau masquée par un premier plan. Je crois avoir vu l'Alpamayo, que certains qualifient de plus belle montagne du monde avec sa pyramide parfaite qui monte presque à six mile mètres. Cette gorge que nous suivons nous fait souffrir, d'autant plus qu'il y des tunnels dans lesquels nous sommes aveugles, mais que le spectacle est grandiose. Nous nous arrêtons discuter avec des hommes en train d'exploiter de manière très artisanale une mine d charbon, du Zola; A 17 heures nous atteignons notre but, bien contents d'en finir. Un petit hôtel très sympathique nous acueille et j'y suis très sensible. Nous rencontrons un Allemand qui va de Trujillo à Lima à vélo et qui pour le moment suit le même itinéraire que nous.

 

J40 samedi 26 septembre

Viru Chuquicara 97 km dont 51 de piste

Départ 8 heures, après une nuit qui n'a pas été très bonne malgré le confort du lieu. Durant 38 kilomètres nous suivons pas panam, mais le trafic est faible. Nous faisons une halte dans une petite ville très active, marché boutiques et beaucoup de monde. J'essaie de commencer à racheter ce que je me sui fait voler. Mais couteau à lame repliable et autres petits objets de campeurs, ils ne connaissent pas. Nous quittons comme prévu la Panam et nous engageons plein est sur un chemin non asphalté mais qui roule bien. Très vite le brouillard se déchire, le ciel devient bleu et la chaleur revient. Nous allons suivre ce chemin durant 51 km. Les trente derniers kilomètres il est de moindre qualité et nous nous devons appuyer un peu plus sur les pédales A notre droite de l'autre côté de la rivière, une belle route goudronnée nous nargue. Mais pas de pont pour la rejoindre. Enfin en voilà un. Encore huit kilomètres et nous arrivons à Chuquicara, lignée de maisons le long de la route, petit air de far-ouest au milieu des grandes montagnes des Andes qui nous entourent. La station service nous loue pour un prix dérisoire deux petites pièces où nous installons. Ce côté spartiate perdu au milieu de nulle part dans des montagnes qui nous écrasent me plait bien. Cette vallée en 1970 a connu un séisme terrible qui a tout ravagé, en particulier du fait de l'effondrement d'un grand lac d'altitude qui a produit un gigantesque déferlement d'eau et de boue, 80 000 morts tout au long de la vallée que nous remponterons les deux jours qui viennent.

 

J39 samedi 25 septembre

Trujillo Viru 58 km

Nos derniers problèmes techniques réglés nous reprenons notre route vers le sud à 11h30. La sortie de la vile n'est pas très compliquée, bien que nécessitant quelques kilomètres dans un trafic intense. Enfin nous voilà sur la panaméricaine; 0 la ville succède le désert. Cela paraît paradoxal à ces latitude, en effet mille kilomètres à l'est on se trouve en pleine forêt amazonienne. Cela est du à un courant froid de l'océan Pacifique qui baigne les côtes à cet endroit. Le paysage est étrange, succession de grands mouvements de terrain, mi-montagnes, mi-dunes. Le tout baigné dans une brume d'altitude qui en estompe les hauteurs et les reliefs. Il fait froid, nous roulons bien habillés. Mais cela ne devrait pas durer, car nous renterons demain plus en avant dans les terres et le phénomène climatique disparaîtra. La route que nous suivons passe d'après la carte à 30 kilomètres de la mer. Jean me fait remarquer, qu'il aperçoit dans la grisaille lamer et les vagues qui se brisent sur la plage. Cela me semble impossible, et pourtant effectivement à quelques trois kilomètres les vagues sont bien réelles. Je commence à douter que nous soyons sur la bonne route, mais pas d'autre alternative, car il semblerait que la route sur laquelle je pense être rejoint la panam trente kilomètres plus loin Et bien non, nous sommes bien sur la panam, mal placée et la route que je crois suivre, tracée sur la carte, tout du moins l'une de nos cartes n'existe pas. Après une cinquantaine de kilomètres nous arrivons dans la petite ville de Virù. Après avoir visité plusieurs hôtels très glauques, nous en trouvons un très sympathique, tenu par une dame fort agréable. Cette petite ville nous plait bien. Comme partout en ce moment au Pérou, les élections battent le plain et il y a agitation et bruit permanents.

J 38 vendredi 24 septembre

toujours Trujillo

Nous sommes un jour de plus dans cette ville pour des problème techniques de vélos. Demain nos affaires devraient se régler et j'espère que nous pourrons reprendre l'action et nous diriger vers la Cordillère Blanche distante de 320 kilomètres. Je dois dire que l'immobilité après m'être fait voler mon sac contenant de nombreuses affaires, est propice à gamberger, et ce n'est pas bon du tout. J'en arrive à me demander ce que je fais là. Mais nous avons changer de lieu pour la nuit. Nous sommes hébergé chez Luchio, connu dans le monde entier par les cyclotouristes au long cours qu'il accueille. Manifestement la pièce dans laquelle nous dormons tout les trois est sympathique et on sent qu'elle irradie des ondes positives. Sans doute toute l'énergie des cyclistes qui y ont dormi, plus de cinq cents. Nombreux d'entre eux ont marqué l'arrêt dans leur périple de l'Alaska à la terre de feu, souvent voyage d'une durée supérieure à un an. J'essaie de me raisonner en me disant qu'il ne s'agit que de pertes matérielles. On m'a conseillé de lire un livre étudiant le dépouillement suite au vol. Il en analyse 16 degrés. En ce qui me concerne, on ne doit pas dépasser le niveau 3 donc à priori, rien de bien grave, mais on ressent tout de même un traumatisme.

 

J 37 jeudi 23 septembre

Trujillo

Notre bus parcourt cinq cents kilomètres en dix heures. La nuit a été pour moi assez confortable. De temps à autre je me réveille, et je constate que nous franchissons des routes escarpées et pas toujours goudronnées. En particulier je me souviens avoir vu une grande descente en lacets dans laquelle des phares de camions se déplaçant à faible vitesse matérialisaient la chaussée.

Nous arrivons à Trujillo à huit heures trente avec une heure de retard sur l'horaire prévu. La ville semble assez agréable. Rapidement nous sommes au centre et trouvons un hôtel. C'est là alors que nous discutons avec le tenancier, qu'un individu entre et demande la carte de l'établissement. En ressortant il est très probablement reparti avec mon sac à dos dans lequel j'avais mis certaines de mes affaires: GPS, appareil photo, habits, lunettes, certains de mes papiers comme contrats d'assurance, billet avion retour, carnet de vaccination, etc.. Heureusement j'avais pris la précaution de photographier les documents importants et de les mettre sur l'ordinateur et sur ma boîte mail. Mais cela donne un bon coup au moral. On se demande toujours si on ne serait pas mieux chez soi. Mais même chez soi, on se fait voler. Il y a six mois on m'a volé mes papiers alors que nous étions dans la maison. Alors il ne faut pas se poser trop de questions et encaisser les coups, en se disant qu'ils font partie de la vie.

 

 

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J36 mercredi 22 septembre

Jaen en attente du bus pour Trujillo à 22h30

Nous avions décidé de nous avancer en bus, car la traversée du Pérou est immense et je n'aurais pas assez de trois mois et demi pour me rendre à Santiago. De plus certaines zones avant la ville de Trujillo sont réputées peu sûres, en particulier à cause des «rançonneurs». Nous avions compris que le bus pour Trujillo était à 10 heures du matin, mais non c'était à 22h30. Nous avons donc une journée à occuper. Nous en profitons pour nous promener dans la ville et nous laisser guider par notre intuition. De toute évidence, la vie est très animée en Amérique du Sud. Le bruit est toujours présent, bien que les véhicules fassent peu de bruit. En particulier dans la ville de Jaen, il y a des milliers de tricycles à moteur, genre pousse-pousse qui font office de taxi. Nous utilisons leurs services pour un prix modique de l'ordre de cinquante centimes d'euro.

Nous assistons à une manifestation de la jeunesse en faveur du respect de la nature et de la personne. Des enfants et des adolescents, défilent en portant des panneaux, abordant une multitude de thèmes: la lutte contre l'alcoolisme, la drogue, le sida, la violence, les infractions routières, le respect de la couche d'ozone etc... Certains des enfants sont déguisés en forêt, en oiseau ou autre représentant de la nature. J'ai fait des clichés attendrissants de tout ce petit monde, mais malheureusement mon appareil photo me sera volé avant que j'ai pu les exploiter.

Vingt deux heures trente, le bus part à l'heure. Tout est bien organisé, en particulier pour les bagages, qui sont bien contrôlés et à l'embarquement et au débarquement. Nous pouvons mettre nos vélos sans les démonter.

 

J 35 mardi 21 septembre

San Ignacio Jaen 112 km

La nuit est somme toute assez bonne, malgré le bruit, car en Amérique du Sud le bruit est omniprésent, et s'il n'y en a pas assez, on allume une radio ou une télé que l'on met à fond et cela à toute heure du jour, jusque tard dans la nuit et on reprend très tôt le matin.

Nous démarrons tardivement, huit heures trente, du fait d'un passage à la banque qui n'ouvre qu'à huit heures. A l'ouverture une longue queue est déjà formée sur le trottoir. Heureusement Alain grâce à l'intervention d'un employé passe assez rapidement, et nous voilà partis. Nous découvrons que contrairement à ce que nous pensions, et qui était mentionné sur nos cartes la route n'est pas asphaltée. A cette heure tardive pour commencer une longue étape, nos espoirs d'atteindre Jaen ne semblent pas réalisables. Après trois kilomètres de montée, nous avons la bonne surprise de trouver une longue descente de 16 kilomètres. Une fois encore en passant sur un caillou Jean crève. Le temps de la réparation nous nous faisons agresser par des petits insectes très urticants. Ils me rappellent les medgeses écossais, qui sont gros comme des grains de poivre moulu et qui attaquent en nuages. Là la densité est moindre, mais les piqures tout aussi douloureuses, générant de gros boutons que l'on a tendance à gratter. Nos jambes sont couvertes de croûtes. En effet, cela fait déjà plusieurs jours que nous sommes soumis à ces horribles insectes que l'on voit à peine.

Une fois au bas de la côte, la piste suit une rivière au gros débit qui serpente dans une vallée large. Il fait très chaud, une brume de chaleur estompe les contrastes et tout semble gris La circulation est faible, mais lorsqu'un véhicule nous double ou nous croise, nous sommes plongés dans un nuage de poussière qui pique la gorge et les yeux. Sur le bord de la route une échoppe propose des jus de fruits. Nous savourons un excellent jus d'ananas, sucré et moelleux, pour un sol ce qui correspond à 0,25 centime d'euro. Des vigiles régionaux y stationnent et nous renseignent. A priori ils surveillent les routes afin de les sécuriser contre d'éventuels délinquants. En tout cas ils ont des armes avec balle engagée dans le canon, donc ils ne semblent pas être là pour rigoler.

Après 55 kilomètres de piste, oh! Miracle, d'un coup sans transition un joli bitume bien lisse prend la relève. Un panneau indicateur mentionne Jaen à 55 kilomètres, il est midi. Nos espoirs de rejoindre cette ville ce soir nous habitent de nouveau. Un restaurant dans un village nous propose l'incontournable poulet riz. Mais là comme en Équateur le repas est accompagné de succulents jus de fruits. Par contre, il est toujours très difficile d'obtenir un café, alors qu'on le cultive dans le pays, inexplicable!

Un peu plus loin , nous réussissons en en obtenir un, très bon. La propriétaire du bar a refusé que nous la payons, elle a insisté pour nous l'offrir. Depuis que nous sommes entrés au Pérou, il ne s'est pas écoulé un jour sans que l'on nous donne quelque chose et cela sans aucune arrière-pensée, refusant toute compensation de quelque ordre que se soit. A quatorze heures, sous un soleil de plomb nous reprenons la route. Mais le goudron et le terrain plat nous rendent l'effort très supportable. Il est très étrange, après plus de trois cents kilomètres de piste, où nous nous traînions à des moyennes horaires à un chiffre, de nous sentir avancer sans trop appuyer sur les pédales à plus de vingt à l'heure. Cependant une côte de quelques huit kilomètres vers les quinze heures, sous une chaleur terrible, nous sommes seulement à six cents mètres d'altitude, va nous faire quelque peu souffrir, bien que nous la montions à un bon rythme.

Nous rencontrons un jeune cycliste qui nous accompagne une vingtaine de kilomètres. Nous nous arrêtons chez lui, ils nous présente à ses parents et nous offre une boisson fraîche. Cela fait du bien et nous change de notre eau et notre coca qui sont au moins à trente degrés.

A cinq heures nous les quittons et entamons les dix huit kilomètres qui nous séparent de Jaen. Le terrain est en descente et nous atteignons la ville avant la nuit. Peu avant cette dernière, nous franchissons un étrange check-point, qui semble tenu par des détrousseurs de route armés de fusils et à moitié habillés de tenue militaire. Ils nous interpellent en nous traitant de gringos, nous montrant des pièces, nous incitant à être généreux. Nous ne freinons pas et nous engouffrons dans la descente raide qui fait suite. Quatre kilomètres plus bas une patrouille de police stationne sur le bas-côté. Je n'ai rien compris à cette étrange situation.

Nous rentrons en ville. Nous sommes dans le tiers-monde, circulation grouillante dans une poussière qui recouvre tout. A la première impression cette ville nous est désagréable, mais nous réviserons notre jugement. Un hôtel qui vient d'ouvrir, il y juste deux semaines, nous proposent de jolies chambres pour l'équivalent de sept euros. Cependant au Pérou, il ne faut pas demander d'eau chaude, d'ailleurs il n'y a qu'un robinet pour l'eau froide. Le patron, gentiment, nous emmène et nous dépose au centre ville pour que nous allions dîner, puis il vient nous récupérer à vingt et une heure trente. Son 4X4 à l'instar des façades des maisons est tout bariolé d'affiches électorales Ici on affiche sans vergogne ses opinions politiques.

 

J34 lundi 20 septembre

Namballe à San Ignacio 45 km de piste

Ce matin nous allons commencer la traversée du Pérou, pays très grand et très montagneux. Au moment de quitter l'hôtel, le propriétaire nous offre une dizaine de bananes. Après un petit-déjeuner consistant à base d'œufs, de riz, de youkas de café et de lait nous sommes prêts pour démarrer. Nous avons pu constater que là aussi comme en Équateur, le matin les rues sont envahies d'écoliers et de collégiens en tenue. La piste n'est pas en bon état, mais elle commence par monter sur presque onze kilomètres. Ensuite vient une courte distance et de nouveau une montée sans fin de huit kilomètres. Durant cette ascension en pleine chaleur, en passant devant une maison, une fois encore on me propose des bananes que je prends. Cela va faire presque vingt kilomètres de côte.

A midi, nous nous arrêtons dans un village au nom évocateur: la Nueva Esperenza. Les gens y sont très gentils. Nous nos installons sur un banc public et consommons nos provisions. Des gamins s'approchent et nous entamons la conversation. A notre tour nous offrons des bananes. L'un des ses gamins nous emmène dans le bar de son père pour prendre un café. Ce village est très agréable et nous éprouvons quelques difficultés à reprendre notre route. Un peu plus loin, ce sont des grenades qui nous sont gentiment proposées. Elles sont succulentes. Vers quinze heures nous atteignons notre but. Nous avons parcouru quarante cinq kilomètres à une moyenne d'un peu plus de huit à l'heure!

Nous avons constaté que la campagne électorale en vue des élections régionales bat son plein. Une multitude d'affiches concernant les différents candidats fleurissent un peu partout. Les maisons sont en pisé, donc de couleur terne. De nombreuses façades sont peintes aux couleurs des différents candidats. Les propriétaires acceptent-ils cela afin d'avoir une façade propre et peinte de fraîche date? Mais que deviendront ces murs peints une fois les élections passées?

Ce soir en arrivant à l'hôtel, nous procédons à un grand nettoyage de nos vélos, car ces centaines de kilomètres de piste les ont franchement salis.

 

 

J33 dimanche 19 septembre

Zumba à Namballe 35km de piste

Le jour se lève une fois de plus sur une journée qui s'annonce humide. Le ville est nimbée de brouillard. Outre la multitude de poules et de coqs qui comme d'habitude font leurs vocalises à ce moment, nous entendons les chants des militaires stationnés à proximité.

Nous espérons faire une grande étape de 70 kilomètres. Rapidement nous comprenons que notre projet ne tiendra pas. En effet le terrain jusqu'à la frontière est une fois de plus très accidenté. Les montées certes jamais très longues, sont cependant particulièrement pentues. L'atmosphère est saturée d'humidité, de gros bancs de brume stagnent accrochés au relief, constitué d'une multitude de mouvements de terrain couverts d'une forêt épaisse.

Nous passons notre dernier village équatorien, puis un peu plus loin, un premier poste militaire Nos passeports sont contrôlés, puis le chef de poste veut être pris en photo avec nous; pour se faire il s'équipe de son fusil et se met fièrement entre nous, tandis que l'un de ses homme prend le cliché. Nous repartons par une crête qui semble monter dans le ciel. Que c'est raide. Un tout dernier petit hameau avant de plonger sur le Rio qui marque la frontière. Un petit bistrot, nous nous y arrêtons boire notre dernière bière d'Équateur. Là on nous met en garde sur le Pérou. Fini pour vous la tranquillité.

Une grande descente et en-dessous nous voyons enfin la frontière. Du côté équatorien, les formalités vite accomplie, nous franchissons un grand pont. Nous sommes seuls. Une barrière en barre l'accès au Pérou. Personne pour l'ouvrir; Nous faisons des signes, ers des personnes de l'autre côté. Elles nous encouragent à passer dessous; ce que nous faisons, puis nous traversons un terre-plein d'une centaine de mètres et arrivons devant un groupe guitare à la main qui chante à capella. De toute évidence, il s'agit des douaniers; L'un d'entre eux se lève et nous emmène dans un bureau pour effectuer les contrôles d'usage. Pendant que nos remplissons un formulaire, il joue au solitaire sur son ordinateur, jetant de temps en temps un coup d'œil sur ce que nous écrivons. Puis il nous envoie au poste de police faire tamponner nos écrits. Là un jeune policier qui se réveille, nous accueil tout sourire. Nous retournons voir notre douanier qui avait repris sa place parmi les chanteurs et rapidement nous sommes libérés. Nous mangeons dans un petit restaurant à même le poste frontière. On a l'impression dans ces points de passage secondaires de se retrouver quelques siècles en arrière, où de temps en temps quelques voyageurs devaient franchir les frontières. En quelques kilomètres nous arrivons à Namballe. La première impression, le niveau de vie semble moins élevé qu'en Équateur, mais nous sommes dans un village reculé. Nous trouvons un hôtel. La tenancière commence par nettoyer la poussière, les clients ne semblant pas se bousculer.

 

J32 samedi 18 septembre

Palanda à Zumba 50 km de piste

Une fois de plus nous passons la nuit dans une petite ville tranquille, bien que quelques gamins aient fait la foire durant la nuit. Après un petit déjeuner «continental», c'est-à-dire lait, café, pain, fromage et œufs et un excellent jus de fruit nous nous mettons en route. Le temps n'est pas terrible; la pluie se met de la partie, ce qui transforme la piste en un cloaque boueux; nos vélos souffrent. Le temps va s'améliorer temporairement. Nous allons passer trois côtes dont la première et la dernière seront terribles. Dans les portions planes, nous sommes à flanc de montagne, et loin en-dessous coule une rivière. On a l'impression de circuler sur une route suspendue entre terre et ciel. Quelques mésaventures vont ponctuer la journée, l'un de nous se fait mordre par un jeune chien, dont il ne s'est pas méfié. Ensuite une crevaison nous immobilisera quelque temps. Au cours de la dernière montée de neuf kilomètres, une pluie soutenue va nous doucher copieusement. Enfin nous touchons au but. Nous trouvons un hôtel qui oh grand luxe propose des douches avec eau chaude, ce qui est rare dans ce pays. En effet le manque d'eau chaude, constitue le seul point faible de l'hôtellerie. Nous passons notre dernière nuit en Équateur, la frontière n'est qu'à quinze kilomètres.

 

J31 vendredi 17 septembre

Yangana Palanda 61 km

Eh oui! Mon anniversaire c'est aujourd'hui et non comme l'a écrit Alain le 15, 57 ans aïe, aïe, aïe!

Lever matinal, car nous nous attendons à une étape carabinée. La nuit a été très bonne, malgré l'espace réduit et l'aspect spartiate des lieux. Depuis que nous sommes dans ce pays nous constatons avec beaucoup de satisfaction l'accueil excellent dans des infrastructures à la propreté impeccable et à des prix modiques. Nous payons 4 dollars chacun pour une literie très propre, pour cette nuit.

Petit déjeuner à six heures trente. Nous retournons dans le petit restaurant où nous avons mangé hier soir. De nombreux travailleurs employés à la réfection de la route que nous allons prendre sont en train de sérieusement casser la croûte avec d'énormes assiettes du sempiternel «pollo arroz» ou en français poulet au riz. Nous engageons la conversation et ils nous expliquent les conditions de travail dans le pays. Dans la réfection des routes ils travaillent dix voire douze heures par jour, dimanche inclus, si nous avons bien compris ce qu'ils nous disaient. Ce qui n'était pas facile, car ils parlent vite, notre maîtrise de la langue n'est pas fabuleuse, et la noria des camions a commencé et ils nous frisent les moustaches au point que l'on ne s'entend plus parler.

Sept heures trente, nous démarrons. La côte est immédiatement supérieure à dix pour cent. L'un des ouvriers nous a prédit que nous devrions pousser les vélos dans les passages raides de la piste. En effet l'étape de ce jour se fera exclusivement sur route en terre. La première partie tout le long de la zone des travaux sera très désagréable, dans la poussière des gros camions qui montent du remblai afin de stabiliser les fondements de la route. Les travaux effectués sont de grande ampleur. Creusement puis remplissage avec des gros galets afin de favoriser le drainage sous la chaussée puis préparation en vue du bétonnage. Les ouvriers nous ont expliqué qu'une route bétonnée avait une durée de vie de quarante à cinquante ans, contre cinq à dix ans pour une chaussée goudronnée.

Une fois passée cette portion en travaux, nous retrouvons une piste déserte ou presque qui monte vers les nuages. Le site est austère, une succession de montagnes couvertes de végétation qui semblent s'étendre à l'infini. Le temps est bien en harmonie avec la sauvagerie du lieu, des nuages menaçants masquent les sommets , accompagnés d'un vent froid qui s'oppose à notre progression. Cependant nous avançons sans trop de difficultés, bien que nous mettions cinq heures trente pour parcourir les trente kilomètres de montée. L'altitude maximum atteinte est de deux mille sept cent cinquante mètres.

Durant ces longues montées à vitesse d'escargot, souvent en limite d'adhérence du pneu arrière sur la terre, voire la poussière, j'ai l'impression de grignoter l'Amérique du Sud centimètre par centimètre. Il vaut mieux ne pas trop réfléchir et ne pas essayer de se représenter la carte du continent!

Un peu avant l'immense descente qui va nous conduire à Palanda, alors que nous sommes arrêtés au niveau d'un ruisseau à franchir, un véhicule type jeep s'arrête et le chauffeur engage la conversation. Il s'agit d'un jeune Australien de Melbourne, qui est parti d'Alaska, il y six mois, et qui compte aussi rejoindre la Terre de Feu. Il a dessiné sur son capot la carte des Amériques et au fur et à mesure de sa progression il matérialise son itinéraire par un trait de couleur jaune.

Une descente de trente kilomètres va nous conduire à notre point de chute de ce jour. Dès que nous basculons en versant sud, la végétation change complètement et redevient tropicale. De magnifiques arbres couverts de fleurs d'un mauve profond, rehaussé par le soleil qui fait des apparitions moins timides donnent à l'espace qui nous environne un aspect riant. Jean crève par pincement de la chambre à air sur un caillou. Nous effectuons un arrêt repas vers les quinze heures à Valladolid, où nous mangeons nos sandwichs assis sur une pierre dans une chaleur retrouvée. Il est étonnant de constater à quelle vitesse la température change dans ces contrées. On ne sait jamais comment se vêtir, un coup très frais avec un air glacial, voire avec une ondée puis dix minutes plus tard un soleil franc et massif qui nous fait suffoquer. Mais dans tous les cas de figure, une humidité ambiante importante qui empêche les habits de sécher.

Un peu avant cinq heures nous arrivons dans la petite ville de Palanda, accrochée au flanc de la montagne. Elle est très animée et le contraste avec les contrées que nous venons de traverser sur soixante kilomètres est saisissant.

Ce fut une étape magnifique, que l'on nous avait prédit très difficile. Nous l'avons trouvée moins éprouvante que certaines effectuées précédemment. Cela est sans doute de bon augure pour ce qui nous attend au Pérou, que nous espérons atteindre après-demain.

Pour le moment nous allons profiter de notre soirée dans cette charmante petite cité. Notre logement dans un hôtel bien sympathique à cinq dollars la chambre individuelle nous ravit une fois d plus par sa propreté et sa gaité.

 

J30 jeudi 16 septembre

Vilcabamba à Yangana 22km

Après une bonne nuit dans une chambre superbe, je pars me promener matinalement dans la ville. Dès six heures trente, nombreux sont les élèves en uniforme, qui convergent vers leur établissement scolaire. Durant plus d'une demi-heure, ils apparaissent de toutes parts. Tous les matins depuis bientôt deux semaines nous pouvons assister à ce même spectacle, des enfants entre 6 et 15 ans, bien propres, se rendant à l'école ou au collège.

Huit heures, petit-déjeuner dans la splendide cour de notre hôtel, nous prenons notre temps et y passons une heure. Ce matin, nous ne nous sentons pas pressés. Jean part alimenter sa page de blog. Alain finit de mettre au point ses derniers récits, et nous partons actualiser sa page. Essayer de tenir une rubrique sur internet relève d'une forme d'esclavage. En effet, le voyage à vélo, avec le programme que nous nous sommes fixés, ne nous permet pas de nous éterniser dans les lieux où nous passons la nuit. En plus, le fait de devoir écrire, puis chercher un point internet pour alimenter nos récits en textes et photos, nous impose de courir bien souvent. Paradoxe du voyage dans la lenteur qu'évoque le voyage à vélo. Jean a un gros déboire, sa page personnelle fait des siennes, ses écrits et ses photos disparaissent sans qu'il en identifie la raison. Espérons que la cause sera trouvée.

A l'hôtel nous discutons longuement avec la tenancière provisoire de l'établissement qui habite dans la Drôme, pas très loin de la magnifique montagne des Trois Becs, plus communément appelée la Pelle par les grimpeurs.

A midi nous nous mettons en route pour une étape de courte durée. Immédiatement ça monte sérieusement. Une fois de plus le temps est instable, et nous sommes soumis à quelques ondées. Pourvu que la période des pluies ne soit pas en avance cette année. Après seulement onze kilomètres arrêt pique-nique. Jean constate que ses patins de freins sont très usés, séance de changement. Hier soir Alain avait déjà procédé à cette opération sur sa monture. Le terrain que nous pratiquons est particulièrement éprouvant pour les vélos. Depuis trois jours nous n'arrêtons pas d'intervenir pour réparer soit un rayon, un porte-bagages, une chambre à air ou des patins de freins. Bien que nous ayons franchi le cap des mille kilomètres, nous n'en sommes qu'au début de notre périple. Dans quel état sera la matériel dans deux mois?

Vers seize heures nous arrivons dans le village de Yangana, où nous trouvons à nous loger chez une femme qui nous loue une chambre pour trois au prix dérisoire de 12 dollars. Certes le confort est minimum, mais le lit est de bonne qualité et les draps sont propres.

Aujourd'hui cette courte étape nous a conduits à travers un relief accidenté qui ressemble à certaines vallées reculées de la Lozère, aux couleurs sombres et aux pentes pelées et raides. Nous avons identifié sur le bord de la route de nombreux épineux aux dards acérés, qui en cas de piqure causent un réel handicap pour plusieurs jours voire quelques semaines. Donc attention, la jeune Française avec laquelle nous avons dîné hier est incapable de marcher depuis douze jours suite à une piqure de cet épineux dans le genou.  Elle nous a expliqué que cette épine développerait un champignon dans le corps, qui entraînerait une forme de paralysie longue à se résorber.

 

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J29 mercredi 15 septembre

Loja à Vilcabamba 48 km

Ce matin le temps n'est pas terrible, il pleut sans discontinuer. Nous allons déjeuner dans un petit bistrot qui nous sert comme à l'accoutumée d'excellents jus de fruits; malgré la pluie nous partons. Par intermittence ça se calme. Nous croisons deux cyclos, un Canadien et un Suisse qui sont en route depuis 9 mois. Ils ont démarré en terre de feu. Sur le bord de la route, ils nous donnent des renseignements précieux. Ils ont un look d'enfer. Manifestement leur voyage à travers les Andes leur a donné un visage rayonnant, comme s'ils étaient touchés par la grâce. Nous déjeunons à Malacatos après une bonne rincée où une fois de plus j'ai eu bien froid. mais dès que le soleil apparaît la chaleur suit de même. Un dernier coup de collier est nous arrivons à la charmante petite ville de Vilcabamba réputée pour ses centenaires. Nous descendons dans un hôtel superbe, même s'il est un peu plus cher que d'habitude de 11 à 15 dollars la chambre, tout de même pas la ruine.

 

J 28 mardi 14 septembre

Yantzaza à Loja 104 km

L'étape de ce jour se promet d'être belle longue et ardue. On s'attend donc à quelques heures intenses. Nos espoirs seront nettement dépassés. En effet le parcours de la journée se découpe en deux parties différentes. La premières 43 kilomètres légèrement vallonnée en remontant le cours d'une rivière. La seconde devrait présenter plus de montée car nous passerons de 950 mètres à 2100 mètres d'altitude en un plus de 60 kilomètres. Mais notre carte étant au 1/700 000, ces indications restent assez imprécises quant au relief réel. Ce que nous allons découvrir!

A la sortie de Yantzaza je prends la photo de la représentation qui trône au milieu du rond-point, qui symbolise l'harmonisation des peuples locaux et de la colonisation. D'ailleurs un peu plus loin je prendrai une autre statue toujours au milieu d'un rond-point qui symbolise le chercheur d'or. En effet nous sommes dans une région aurifère.

Comme prévu la première partie est parcourue à vive allure sur une route peu passante, entourée de végétation tropicale. Seuls les chiens qui nous coursent régulièrement nous donnent parfois quelques émotions. Jean dans un village se fait prendre à partie par un roquet devant deux femmes. Il dégaine son bidon et lui envoie une giclée en pleine figure, ce qui le bloque net. Les deux femmes éclatent de rire et le chien s'enfuit tout honteux. Pour ma part je vais affiner ma technique. La petite poche droite de ma sacoche de guidon me sert de réserve de cailloux et si les cris ne suffisent pas je me mets à canarder. Je commence par des petits et si le claquement au sol ne suffit pas je sors la grosse artillerie et je vise la tête. J'ai du au cours de cette journée m'arrêter à plusieurs reprises pour faire le plein de munitions. Mais c'est surtout dans la seconde partie que nous serons harcelés.

Arrivés à la ville intermédiaire de Zamora, nous nous arrêtons un peu avant la ville intrigués par un avion de combat sur un pylône. Il rappelle le sacrifice des pilotes équatoriens morts au combat durant la guerre de 1981 contre le Pérou, dont je ne connais pas la raison.

Nous buvons un chocolat, il n'est que 9h30. Ma roue semble un peu voilée, Alain découvre que j'ai un rayon cassé. Il est expert en mécanique de vélo et en vingt minutes ma monture est réparée. Entre le petit arrêt casse-croûte et la réparation une heure s'est envolée. Mais pour la soixantaine de kilomètres restant, nous pensons avoir tout notre temps. Nous repartons à 10h30, la montée est raide, la pluie commence. La vallée dans laquelle nous nous enfonçons disparaît dans le brouillard. Cependant la route est large et le trafic relativement dense La chaussée est bétonnée, ce travail est en cours, entreprise gigantesque. Après une quinzaine de kilomètres nous sommes arrêtés, car la circulation est alternée à cause des travaux. Je constate qu'il me manque une vis au porte-bagages. Heureusement celle de mon bidon fera l'affaire. L'arrêt se prolonge. Le chauffeur du bus qui attend à côté de nous vient proposer ses services pour réparer. Mais ce n'est pas nécessaire. La discussion s'engage et il nous demande nos âges et est tout étonné. Alain sort son appareil photo est lui montre la photo de son petit-fils.

Nous repartons, la côte n'en finit plus; sur ce grand pan de montagne on se demande toujours où la route va passer. Une fois atteinte l'altitude de 2100 mètres, nous commençons à nous poser des question. En effet rien n'indique une halte dans la côte. Le temps devient exécrable, pluie forte et brouillard. A ce rythme nous allons nous retrouver de nuit en route. Ça monte, ça monte! Nous passons allégrement les 2500 mètres puis nous arrivons enfin au sommet avec moins de cinquante mètres de visibilité. Il est 17h30 et sous ces latitudes dans moins d'une heure la nuit sera totale. L'altimètre dépasse les 2850 mètres, ce qui veut dire que depuis notre arrêt à Zamora, en tenant compte des trois petites descentes, nous avons fait plus de 2000 mètres de dénivelé avec une montée presque continue sur 46 kilomètres. Les derniers cinq kilomètres dans un brouillard épais et une pluie battante, nous ont presque fait croire que jamais cela ne finirait, d'autant plus que nous ne savions pas l'altitude du col. En effet depuis notre départ de Quito, nous sommes passés plusieurs fois à plus de trois mille mètres à vélo. Enfin la descente, je suis transis. Je me précipite. Quelques centaines de mètres plus bas nous sommes sous la couche nuageuse et tout en bas la ville de Loja apparaît. Nous y arriverons juste à la tombée de la nuit. Cette journée nous nous en souviendrons tous les trois.

 

J 27 lundi 13 septembre

Gualaquiza à Yantzaza 80 km

Après une nuit réparatrice je me réveille vers les cinq heures du matin. Incroyable le nombre d'animaux que l'on entend, alors que l'on se trouve en pleine ville. Les chiens ne sont pas les derniers, mais les poules elles sont les premières. On a vraiment l'impression chaque matin de dormir au milieu d'une basse-cour, alors que l'on ne voit pas un seul gallinacé.

Vers les sept heures trente, les humains commencent à sortir. Des quantités d'élèves entre cinq et quinze ans se rendent à l'école ou au collège. Tous sont en uniforme, chemise bleu clair et pantalon ou jupe bleu marine. Tous arborent, même les plus petits, une belle cravate sombre. Dans ce pays une discipline bien acceptée règne.

Alain découvre que son pneu est crevé, sans doute conséquence du chemin mal pavé d'hier. Nous démarrons à huit heures trente. Nous avons appris qu'il ne fallait pas tirer de plan sur la comète en matière d'horaire et de difficulté de parcours, la topographie du pays impose sa loi. Mais tout commence très bien, une excellente route, pas trop de côtes, le vent inverse pas trop fort. Nous forçons avec plaisir sur les pédales dans un décor agréable et une quasi-absence de circulation. Cette sensation qui me pousse à partir à vélo je la ressens bien ce matin. A tour de rôle, chacun ouvre la voie à bonne allure et les deux autres se glissent derrière avec un effort moindre. Tout au long de la route, des chevaux et des vaches sont à l'attache. Nous croisons deux chevaux qui se sont libérés de leur entrave, pourvu qu'ils ne leur arrive rien. Nous passons souvent devant des maisons isolées très simples, mais magnifiquement entourées de jardins multicolores. Mais malheureusement, je suis bien incapable de donner un nom à ces différentes plantes, hormis les youkas, les bananiers et des espèces de grands palmiers. Nous faisons une petite halte pour prendre un chocolat dans un village. Tous ces villages sont à maisons à un niveau et tous possèdent une église multicolore qui règne sur le lieu.

Un jeune élève en tenue reste sur le passage clouté en nous voyant arriver. Manifestement il est très intrigué. Nous nous arrêtons pour lui dire bonjour. D'une voix timide, il me demande comment je m'appelle, ainsi que le nom de mes compagnons. Puis il me demande où je vis. Je lui réponds en France. Il ouvre de grands yeux, marquant son incompréhension. Je lui parle de l'Europe de l'autre côté de la mer après la forêt loin à l'est. Son ébahissement reste le même. Mais à la réflexion, je ne sais pas si l'Amérique du Sud évoquerait quelque chose chez un jeune Français de cinq ans!

Vers les treize heures, un arrêt de bus en plein campagne nous procure l'ombre indispensable à notre pique-nique frugal. Il nous reste 26 kilomètres, que nous allons franchir en nous relayant à vive allure, malgré la chaleur. J'adore ces étapes abattues à grande vitesse, un peu à la manière d'une course. Le corps répond bien malgré l'effort qu'on lui demande, on a l'impression d'avoir dix-huit ans!

Il est quatorze heures et, déjà, nous sommes au terme de notre étape, une fois de plus dans une petite ville à l'aspect très tranquille. Les hôtels fourmillent, alors qu'il n'y a pas trace de tourisme. Nous n'avons que l'embarras du choix.

 

J 26 dimanche 12 septembre

San Don Bosco à Gualaquiza 54,5 km en 8h45

Lever à 5h30, nous avons droit à un petit-déjeuner consistant, confectionné par une mama dont l'espagnol est difficile à comprendre. J'effectue un dernier tour devant l'église de cette petite ville à l'atmosphère tranquille, dominée par cette énorme montagne en forme de pain de sucre. J'ai été étonné hier en pénétrant dans l'église de constater qu'un office était en cours, mais je n'ai pas vu le prêtre. J'ai eu l'impression que le rite se déroulait au rythme d'une bande enregistrée. Cependant les fidèles reprenaient en chœur les cantiques.

Départ à 6h45, immédiatement le ton est donné, un chemin caillouteux raide et instable part au beau milieu ds montagnes. Après 8 kilomètres de montée sans interruption qui nous demande presque deux heures, un panneau indique Gualaquiza à 51 kilomètres. Cela me donne un coup sérieux au moral. Va-t-on y arriver aujourd'hui? Enfin un premier col est atteint après plus de dix kilomètres et six cents mètres de dénivelé. Durant toute cette côte nous avons gardé sur notre droite cet énorme pain de sucre, ce qui donne la dimension de ce qui nous entoure.

Cependant, un point positif, il y a très peu de trafic. Il faut reconnaître que la correspondance entre ces deux villes n'est pas facile. Après une descente entrecoupée de quelques montées, nous arrivons à une rivière qui marque un point bas. Le compteur affiche 26 kilomètres. Nous repartons dans une montée de quatorze kilomètres, qui semble ne plus finir avec une fois de plus six cents mètres de dénivelé. Les quelques véhicules rencontrés, souvent des pick-up chevrolet nous gratifient de petits coups de klaxon d'encouragement. Des fous de notre genre il ne doit pas en passer beaucoup. Cependant, une dame nous a dit à San Don Bosco que trois Français à vélo nous précédaient de deux jours. Nous aurons peut-être l'occasion de les rencontrer?

Mais si nous n'avons pas vu grand monde, à plusieurs reprises il nous a fallu gérer les chiens qui nous entendant, se ruaient à nos trousses. La technique de Jean, consistant à laisser le chien aboyant s'approcher et de lui envoyer une giclée d'eau avec son bidon, est radicale. L'animal tout surpris de ce qui lui tombe sur la tête abandonne toute velléité de poursuite. On voit qu'il n'a pas compris ce qui lui arrivait. On se ferait poursuivre rien que pour voir la tête des chiens recevant leur giclée. Mais cependant, il faut rester vigilant, car on n'est jamais à l'abri d'une mauvaise réaction et la morsure dans ces pays peut être problématique malgré notre vaccination antirabique. Donc la technique la plus sûre est de s'arrêter et de les menacer, voire plus, avec des cailloux avant qu'ils ne soient trop proches, car ils arrivent fréquemment à plusieurs.

Au kilomètres quarante, une immense descente de quinze kilomètres nous conduit à Qualaquiza. Sur ce versant de grands travaux préparatoires à l'asphaltage sont en cours. La pente est accentuée, et les doigts crispés sur les freins font mal. La vitesse est à peine supérieure à celle de la montée. Le dosage du freinage est primordial. Ne pas accélérer au-delà d'une vitesse qui rend la monture instable, sans pour autant serrer trop fort, car la roue avant dérape sans prévenir et la chute devient inévitable avec l'inertie du poids des bagages.

Vers les quinze heures, nous touchons enfin notre but, encore une petite ville blottie au creux des montages et de la forêt équatoriale. La journée aura été difficile, du fait de la chaleur de l'instabilité du chemin et de la moyenne horaire très faible. Par moments, on ne peut s'empêcher de faire le lien entre cette allure d'escargot et le fait de vouloir traverser l'Amérique du sud, et là le moral en prend un petit coup. Mais c'est sans doute un défaut de notre mode de pensée occidental, qui veut absolument tout rationaliser et tout mettre en équation. Nous avons prévu dans les parties les moins intéressantes de notre périple de nous avancer en bus, car je ne dois pas perdre de vue la date que j'ai donnée, le dix décembre à Santiago.

 

J25 samedi 11 septembre

Limon San Don Bosco 36 km

La nuit a été très bonne, l'hôtel très confortable, eau chaude à profusion et le tout pour six dollars la chambre individuelle, c'est moins cher que le camping en France. J'ai dormi d'un seul somme de 21h à 5h45, ce qui ne m'arrive jamais. Je me réveille frais et commence par lire, un peu de Maupassant, puis je fais ma leçon quotidienne d'espagnol. Je fais des progrès sensibles. Selon les interlocuteurs je comprends soit très bien soit rien du tout. C'est un peu comme l'anglais; la manière de parler, le débit et surtout l'articulation sont des éléments qui font toute la différence.

Je donne un petit coup de main à Alain pour frapper les textes qu'il a écrit concernant les jours derniers. A sept heures petit- déjeuner, la salle à manger de l'hôtel est pleine et ça continue à bourrer, d'où viennent tous ces gens? Beaucoup de Noirs d'un certain âge avec des grands chapeaux. Nous allons déjeuner dans une boulangerie qui sert des cafés. Nous apprenons, la bonne surprise, que la route dans la portion qui suit n'est pas asphaltée et que son état n'est pas très bon. Nous nous mettons en route seulement à neuf heures. Mais comment avons-nous fait pour mettre tant de temps?

Comparée à l'étape d'hier, celle prévue aujourd'hui, 81 kilomètres, nous semble facile; mais les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Hier en 1h40 nous avions effectué 40 kilomètres, aujourd'hui dans le même temps moins de huit. Cela augure bien de la journée. Les onze premiers kilomètres se déroulent le long d'un chemin raide plein de pierres et poussiéreux, sur lequel circulent camions et cars, le tout soulevant de gros nuages de poussière. Je fait ma première chute. En redémarrant dans un raidillon, ma chaussure se clippe sur la pédale et la roue dérape sur le sol instable, donc je me retrouve par terre. Mais, heureusement sans mal, mon gant m'a protégé d'un caillou pointu. Il nous faut deux heures et demie pour en venir à bout. Au sommet de cette première côte une baraque vend des boissons fraîches, nous achetons une bouteille de trois litres de coca-cola que nous entamons très nettement. La chaleur, malgré l'altitude de 1600 mètres, monte. Mais pour le moment c'est mieux qu'hier. Une grande descente sur gravillons demande de l'attention. Puis oh! Miracle le goudron fait son apparition, mais bien vite à nouveau la terre. Par portion asphalte et chemin de terre se succèdent. La route s'insinue dans d'immenses pans de montagnes boisés, sans que de mouvements de terrain bien identifié ne fixent un axe. On a vraiment l'impression de partir pour nulle part de gigantesque moutonnement en gigantesque moutonnement. Une espèce de brume sèche, qui efface les reliefs, augmente cette impression de nulle part, d'autant plus au milieu de ce foisonnement de montagnes. Certaines sont de véritables dents qui nous dominent sans doute de plusieurs milliers de mètres, mais c'est très difficile à évaluer. Des côtes qui comme les jours précédents qui ne semblent jamais finir, alors qu'à chaque virage on a l'impression d'arriver à un col. Nous comprenons que notre objectif du jour s'éloigne. A la petite ville de San Don Bosco vers treize heures trente nous décidons de nous arrêter. En effet, les 45 kilomètres restant dans la chaleur et la poussière, nous n'avons aucune chance de les parcourir avant la nuit. Cette ville est accueillante, une belle église peinte avec un Jésus sortant d'un volcan est du meilleur effet. Nous déjeunons dans un restaurant agréable pour un prix dérisoire, huit dollars à trois avec une nourriture de qualité et très saine, poissons d'Amazonie, genre de grosses perches soleil, et puis profusion de jus de fruits. Depuis que nous sommes en Équateur, cela fait plus de trois semaines, nous nous en gavons. Mon préféré est le jus de tomates des arbres, fruit sucré et très doux donnant un liquide consistant et très rafraîchissant. Nous trouvons des chambres pour la nuit, desquelles nous pouvons admirer une forêt de pics colonisés par la jungle.

J24 vendredi 10 septembre

Macas Limon 115 km

Étape difficile, nous sommes partis à 8heures 20. Les premiers 70 kilomètres ont été parcourus rapidement. A midi nous étions au niveau de la ville de Mendez, où nous envisagions de nous arrêter. Mais vu la vitesse avec laquelle nous avons parcouru ces 70 kilomètres , nous décidons de pousser jusqu'à la ville de Limon, qui se situe 43 kilomètres plus loin. Pour effectuer cette distance, il va nous falloir presque 6 heures. D'abord la chaleur terrible qui sévit à partir de midi, 45 au soleil, puis des côtes qui n'en finissent jamais. La route passe d'un versant à un autre enserrée entre des montagnes boisées aux pentes raides. Mais toujours ça monte. Enfin à dix huit heures nous atteignons la petite ville de Limon, pour un repos attendu avec impatience. L'Équateur à vélo c'est vraiment très difficile, nous l'avions lu à plusieurs reprises, et bien nous pouvons le confirmer.

En tout cas dans ce pays la protection de la nature est vraiment prise en compte. Il y un nombre considérable de panneaux rappelant qu'il faut faire attention à l'environnement, à l'eau, aux arbres et aux animaux sauvages.


 

 

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J23 jeudi 9 septembre

En pleine nuit, je me suis levé pour essayer de voir une seconde fois la Croix du Sud. Malheureusement, une lumière même faible due à l'éclairage électrique ne permet pas une bonne visibilité du ciel. J'aurais sans doute d'autres occasions sur l'Altiplano pour la contempler. En effet, nous sommes seulement vers les mille mètres d'altitude et l'humidité ambiante ne favorise pas non plus l'observation du ciel.

A six heures trente l'une des filles de Moïse vient nous chercher pour le petit-déjeuner et nous voilà partis pour la forêt. Nous montons dans une camionnette déjà bien remplie, qui nous conduit quelques kilomètres plus loin au démarrage d'une piste raide.

Durant quatre heures, Moïse va nous montrer les joyaux de cette forêt. Il est originaire d'un endroit beaucoup plus à l'est en pleine forêt loin de toutes routes. Il y a vécu toute sa jeunesse. Par ses parents et ses grands-parents il a été initié aux secrets de la selva. Nous aurons le plaisir de goûter un certain nombre de produits étonnants, tout en cheminant sur des pentes escarpées et boueuses. Il cueille une branche de quelques centimètres de section, en retire l'écorce et nous la propose à mâcher.Il en sort une sève abondante au goût acidulé. Un peu plus loin, il fait une entaille dans l'écorce d'un immense arbre avec sa machette. Se met alors à couler un liquide rouge sang, l'arbre saigne véritablement. Lorsqu'on récupère ce liquide dans la main, on a vraiment l'impression d'être blessé. Il nous demande de nous en mettre un peu sur la langue. C'est amer, mais les vertus médicamenteuses sont multiples, en particulier pour les reins et l'estomac. Ensuite, il nous demande de nous en frotter sur la peau. Cela donne immédiatement une émulsion blanche collante, aux vertus répulsives contre les insectes et protectrices contre les rayons du soleil. Cet arbre est appelé « le sang du dragon». Un peu plus loin, nous admirons de superbes fleurs jaunes et rouges qui attirent les colibris. Puis il nous fait patienter quelques minutes, le temps de cueillir de petites bananes succulentes sucrées douces et bien mûres. Il s'arrête vers une grosse termitière accrochée au tronc d'un arbre et nous explique que les termites servent à nourrir les poules. Le poulet en Amérique du Sud, c'est quasiment à tous les repas qu'on vous le propose, petit-déjeuner compris. D'autres fruits comme le citron ou la goyave nous accompagneront au cours de cette matinée. Durant cette promenade initiatique en pleine forêt, pratiquement aucun insecte n'est venu nous importuner. Certes nous avons reçu quelques piqures, sans nous en apercevoir, mais du fait de l'altitude du lieu la malaria n'est pas présente.

Vers onze heures nous sommes redescendus dans sa maison de planches très sommaire. Sa femme et ses filles nous ont préparé une bonne soupe et puis nous les avons quittés en faisant une dernière photo de la famille réunie devant la porte. Sur la grande route le bus nous a ramené à Macas. Là nous attend notre chambre d'hôtel. Bien qu'il s'appelle le Splendid, les chambres ne sont vraiment pas reluisantes, pour ne pas dire plus! Nous ne payons que 8 dollars, mais pour 7 dollars à Banos nous avions une chambre qui elle était splendide. D'ailleurs, généralement les hôtels fournissent en Équateur de bonnes prestations pour des prix faibles.

 

J22 mercredi 8 septembre

Étant dans une ville, située en bordure de forêt, Jean trouve qu'il serait intéressant d'aller y faire un petit tour en compagnie d'un indien, en mesure de nous expliquer certains secrets de cet endroit mythique de la planète. Après quelques tribulations, nous voilà partis pour une petite communauté indienne implantée une quinzaine de kilomètres au sud de Macas.

Vers les quatorze heures, Moïse nous accueille. Eh oui! c'est bien son nom. Cependant il n'est pas catholique, son épouse l'est, et ses parents sont batistes. Drôle de mélange, mais à priori cela ne génère aucun conflit. Leur véritable religion, ce qui est valable pour tout le peuple Shuar, c'est le respect de la forêt de laquelle ils tirent leur énergie et leur motivation pour la vie.

Il y encore un demi-siècle ces tribus pratiquaient la réduction de têtes. Mais si j'ai bien compris ce que nous disait notre guide, il ne fallait pas croire qu'à tous les coups on allait vous réduire la tête. Non, il fallait le mériter, c'est-à-dire être un guerrier vaillant, duquel le réducteur pouvait retirer de l'énergie pour se fortifier. Moïse, sur son bras à l'aide d'une coque qu'il cueille et d'une brindille, dessine le symbole des peuples réducteurs de têtes.

Après être allés nous baigner à la rivière, nous dînons frugalement de riz et de plantes de la montagne, genre tubercules qui ont un peu le goût de la patate douce. Ensuite il nous emmène faire le tour du village et de ses amis. Nous sommes reçus amicalement. Puis vient le moment d'aller se coucher. Il nous conduit vers une grande bâtisse en bois, l'ouvre, elle est vide de tout meuble. Nous mettrons nos sacs de couchage à même le sol. La nuit sera assez«dure»!

 

J21 mardi 7 septembre

Rio Pastaza Macas 63 mk

La nuit a été assez bonne. Je me suis fait un lit avec quatre bancs. L'atmosphère était assez étonnante. Ces deux rivières juste sous notre lieu de bivouac faisaient un bruissement du à la rapidité de leur courant. Le réveil au lever du jour avec ce spectacle, eaux vive, forêt dense et grande nappe de brouillard noyant le tout, donne vraiment l'impression d'être très loin au cœur d'un lieu désert. Nous plions nos affaires, donnons cinq dollars au gardien du lieu et partons petit-déjeuner dans le même établissement qu'hier soir. Nous déclinons la proposition de manger du poulet. Ce matin ce sera , pain, fromage, œufs et café.

Alors que nous finissons notre repas, une pluie serrée se met à tomber. Mais nous ne serons pas arrêtés, et nous ferons les quarante premiers kilomètres de notre étape du jour dans une ambiance très humide.

Mais le spectacle de cette forêt aux essences multiples est un enchantement. Malheureusement je suis incapable de mettre un nom sur la plupart des arbres qui se dressent sur notre route. Cependant, je reconnais bambous géants, roseaux, canne à sucre, bananiers, avocatiers.

A quatorze heures après avoir traversé le territoire des Jivaros, les réducteurs de têtes, nous atteignons la petite ville de Macas. Le lieu est agréable, le beau temps revient. Nous nous y promenons longuement. Puis à vingt heures nous partons manger notre ration de poulet au riz, que nous arrosons d'un super jus de fruit. Pour ma part je prends un succulent jus de « tomates des arbres».

J20 lundi 6 septembre

Puyo Chuitayo (bivouac en bordure Rio Pastaza) 73 km

Cette nuit il a beaucoup plu. Le toit de ma chambre est en tôle, ce qui fait que les gouttes d'eau font un boucan terrible, un peu comme si l'on tapait sur tambour. Petit déjeuner vers les 8 heures; ce matin comme pour la majorité des repas, ce sera riz avec du poulet, cela passe très bien et ça tient au ventre. Ce qui ne nous empêche pas de boire un grand café. Avant de partir nous effectuons quelques courses, en particulier nous effectuons le plein en essence de notre réservoir de réchaud. En effet en Amérique du sud, en particulier Équateur, Pérou et Bolivie il est très difficile de trouver du gaz, d'où le fait d'utiliser un réchaud à essence.

Tout cela prend du temps et nous mettons en route vers 9 heures trente. Nous traversons la ville qui est tout en longueur. Une fois les dernières maisons dépassées, comme par magie, la circulation devient pratiquement inexistante. D'autre part la chaussée est toute neuve et parfaitement lisse. Cela nous change d ce que nous avons vu jusqu'à présent dans ce pays. Seul petit point négatif, à plusieurs reprises des chiens surgissant de leur propriété se lancent à notre poursuite. Chacun sa technique de gérer sa défense. Jean lui opte pour le jet sur la tête du chien à l'aide de son bidon de cycliste. Pour ma part, je ne veux pas que le chien s'approche trop près. Je descends donc généralement du vélo, faisant face au chien en criant plus fort qu'il n'aboie, ce qui le stoppe dans son élan et le maintient à distance.

La route traverse la forêt. Une multitude de plantes, qui pour la grande majorité me sont inconnues avive notre curiosité. Sans que nous puissions les voir , de nombreux oiseaux font entendre leur chant, parfois tout à fait curieux. Il me semble reconnaître le sifflement du perroquet.

Pour le déjeuner nous nous arrêtons dans un village et mangeons devant un grand hangar qui abrite un terrain de hand-ball.

Dans l'après-midi, il se met à pleuvoir, par moments très intensément. Mais cela n'altère pas notre plaisir à rouler dans un tel décor. Vers 17 heures, nous atteignons le Rio Pastaza, rivière impétueuse, qui roule des eaux couleur terre. Un drôle de lieu va nous permettre de bivouaquer. Une ancienne hostellerie, dont nous ne verrons pas le gardien à temps situé au confluent du Rio Pastaza et de l'un de ses affluents. De ce fait nous nous installerons sous un grand préau, où nous passerons somme toute une nuit confortable. Mais avant de prendre nos quartiers de nuit, nous allons dîner dans un petit restaurant, seul isolé en bordure de fleuve en pleine forêt. Un peu avant la tombée de la nuit, nous assistons à un spectacle étonnant, une trentaine d'aigles font quelques tours avant de disparaître dans les arbres.

 

 

J19 dimanche 5 septembre

Banos Puyo

Ce matin nous prenons notre temps. En effet l'étape ne devrait pas être très longue ni très difficile. 60 kilomètres en descendant des gorges, de plus l'altitude passera de 180 à 1000 mètres, donc nous avons nous attendons à un court moment de plaisir. Nous flânons dans la ville de Banos. Cette cité est vraiment étonnante, enserrée au milieu des montagnes. Nous effectuons un petit tour dans un internet café afin de poser quelques textes. Pour des raisons de compatibilité, entre Word et OpenOffice, je n'arrive pas à mettre mes textes ce sera pour plus tard. Un petit tour du côté de l'église, nous permet de constater, s'il en était besoin, que l'Amérique du sud est une régin très catholique. La très grande église est archi-comble. Dans cette ville tout rappelle que l'on vit sous la menace du grand volcan qui domine les lieux du haut de ces 5023 mètres, ce qui fait un dénivelé de plus de trois mille mètres par rapport aux habitations. La dernière éruption n'est pas vieille, elle remonte à 2006. La population avait été évacuée, mais elle était revenue d'elle-même, avant qu'on lui donne l'autorisation.

11heures30, nous démarrons. Le temps est toujours menaçant, de gros nuages encombrent la vallée resserrée que nous allons descendre; Malgré la descente, un fort vent contraire nous ralentit. En ce dimanche, il y a beaucoup de monde. Tout au long de cette journée, nous aurons le loisir de voir une multitude de gens s'adonner à différents sports liés au lieu, du fait de l'eau et des pentes, canons, saut à l'élastique, tyrolienne...

Au fur et à mesure que nous progressons l'altitude diminuant, la végétation change; Nous pénétrons en Amazonie. Une multitude d'arbres, de toutes espèces, j'ai ouï dire, trois cents espèces à l'hectare, colonise les pans de montagne qui nous entourent. La chaleur devient plus forte; cependant nous ne faisons pas que descendre. De temps à autre des côtes, certes pas très longues, mais très raides brisent notre élan. Enfin au débouché de la gorge, alors que nous dominons encore la vallée, devant nous la forêt amazonienne déroule ses frondaisons jusqu'à l'infini.

A 16 heures nous arrivons à Puyo. Petite ville en longueur, qui fait penser à ces cités du far-west. Les chevaux ont simplement été remplacés par des cars rugissants .Un petit hôtel propre nous accueille pour six dollars. A ce tarif, le personnel peut se permettre d'être à la limite de la politesse! Nous voulons prendre une bière dans un bistrot le long de la rue. Il nous est répondu que cela n'est pas possible, car sur directive du gouvernement pas d'alcool le dimanche. Nous dînons dans une petite gargote. La nourriture est excellente et abondante et le tout pour deux dollars chacun.

J18 samedi 4 septembre

Latacunga Banos 87 km

Réveil matinal, dès quatre heures du matin j'entends la ronde infernale des véhicules sur la panaméricaine. Alain de sa chambre avant que les nuages ne deviennent trop présents a aperçu le otopaxi. A 7heures, tous deux nous partons nous promener sur le marché de la ville. Il est immense, on y vend tous les légumes possibles et imaginables. Outre les variétés des zones tempérées,jusqu'au cardons, de jolis fruits exotiques rehaussent la couleur des étals.

Nous retrouvons notre Japonais pour le petit-déjeuner.

Nos routes sont identiques sur les trente premiers kilomètres. Nous allons donc rouler tous les quatre. A Ambato nos itinéraires se séparent. Lui continue par la panaméricaine, nous bifurquons vers la ville de Banos. Nous espérons que sur cet itinéraire la circulation sera moins dense. Ce en quoi nous nous trompons. Des portions de route en travaux, desquelles s'élèvent des nuages de poussière ajoutent à l'agrément de pédaler. A treize heures nous déjeunons dans un petit local en bord de route. On nous sert un poisson pas très gros mais à la chair ferme. Il ressemble à une espèce de perche ou à un piranhas. Sur ce bord de route une circulation incroyable de bus, plusieurs à la minute produit un bruit assourdissant; Bien repus pour 6 dollars à trois nous reprenons notre route. De temps en temps des panneaux publicitaires vantent les bienfaits des réalisations du gouvernements, par des slogans du type: vois ce que nous faisons de tes impôts, cette route; vive la patrie le pouvoir est à toi...

Lorsque nous nous rapprochons de Banos, le temps devient menaçant, de gros nuages sombres rôdent. Un vent défavorable nous ralentit. Cela fait maintenant deux jours que nous peinons contre. Le volcan qui domine la ville apparaît dans toute sa grandeur. Il se nomme Tungurahua et culmine à 5023 mètres. Il écrase littéralement la ville. Une immense descente nous conduit à notre destination. Un peu avant d'entrer dans Banos, nous traversons d'immenses dépressions qui manifestement sont les voies par lesquelles s'écoule la lave lorsque le volcan se réveille. Les premiers panneaux que nous voyons nous intriguent. Ils indiquent la direction à prendre en cas d'éruption volcanique pour se retrouver en sécurité!

Banos est une petite ville très touristique logée au fond d'un cirque montagneux aux pentes très raides, couvertes d'une végétation équatoriale exubérante. L'altitude n'est plus que de 1800 mètres et il y fait très doux. L'hôtel dans lequel nous descendons est absolument charmant pour un prix dérisoire de 10 dollars. J'ai l'impression de vraiment rentrer dans mon périple Quito Santiago.

J17 vendredi 3 septembre

Quito Latacunga 68 km

départ prévu à 9heures, le pick-up réservé la veille ne vient pas. Décidément Quito ne veut pas nous lâcher. Nous retournons dans la rue du marché couvert et nous en trouvons un autre, qui pour trente euros nous fera parcourir les trente kilomètres pour sortir de Quito par le sud. Cette ville est incroyable, un enchevêtrement de collines très raides et couvertes de maisons. Au milieu de ce fouillis de constructions des voies rapides à la pente effrayante. Heureusement que nous ne partons pas à vélo. Avec Alain nous nous mettons avec le vélo sur le haillon. Au revoir Quito, nous sommes contents de vraiment attaquer notre descente vers Santiago. A 11heures nous enfourchons nos montures. Le vent est contraire. L'enfer de la panaméricaine reprend. Par chance souvent il y a une bande sur le bord nous permettant de rouler en assez bonne sécurité. Cette espace est entre la bande d'arrêt d'urgence et la piste cyclable. Ca commence par monter, pas trop fort mais la côte va se poursuivre durant trente kilomètres, avec un passage vers les 3600. D'ailleurs cela se sent à la température qui se rafraîchit nettement. Quelques centaines de mètres en dessous de ce col sans nom, une petite baraque nous permet de prendre un repas chaud et consistant. D'ailleurs il s'agit d'un routier local, en effet plusieurs gros camions viennent y stationner et leur conducteurs s'y nourrir. Il est 14h30 lorsque nous repartons. Il nous reste un peu plus de trente kilomètres pour atteindre la ville de Latacunga. Par chance, et c'est une bonne surprise uniquement de la descente. Il nous arrive même de dépasser des camions freinant en descente. Parfois nous les doublons à gauche, mais parfois en restant sur notre bande à droite; dans ce dernier cas, on prend le risque de voir le camion se rabattre car il ne nous voit pas toujours. Mais s'engager à gauche avec des bolides dévalant les côtes, surtout les cars, on n'ose pas toujours. Ne pas oublier que la panaméricaine ressemble plus à une autoroute qu'à une route. D'ailleurs on passe un péage, qui est gratuit pour les vélos, mais cela fait bizarre de se présenter au péage. Un peu avant 17heures nous atteignons notre but. Nous faisons le point à un carrefour où une policière armé d 'un sifflet en bouche essaie sans trop de résultat de contrôler la circulation. Pourtant elle arbore un beau pistolet à la ceinture. Lorsque nous lui demandons un renseignement concernant un hôtel, elle laisse tomber sa circulation et très gentiment nous explique où aller. Nous descendons dans un petit établissement très propre où la chambre individuelle nous revient à 7euros. En même temps que nous arrive un cyclotouriste japonnais qui roule depuis 4ans et qui a déjà parcouru 63 000 kilomètres; Nous dînons tous les quatre. Il nous parle de ces différents trajets avec son vélo de 70 kilogrammes bagages compris. Il y a vraiment des martiens sur cette terre!

J16 jeudi 2 septembre

Comme prévu, nos guides nous réveillent à l'heure prévue. Effectivement nous avons deux guides, car nous sommes trois et qu'une cordée ne dépasse pas trois pour des raisons évidentes de sécurité. Départ une heure du matin sous la neige. Je me sens fatigué, ne m'étant pas reposé, en effet à 4800 mètres il est difficile de trouver le sommeil. Après une bonne heure de marche dans la neige qui a recouvert le pierrier, nous nous arrêtons pour chausser les crampons, car nous allons attaquer le glacier. Le début sans être très raide est assez délicat car la glace vive est toute proche. Ce glacier est vraiment tourmenté. Nous monterons jusqu'à 5700 mètres. Pas à un seul moment la neige ne s'arrêtera. Donc nous faisons demi-tour à 200 mètres du sommet. Pour ma part, je ne pense pas que je serais allé beaucoup plus haut, car depuis le départ une forte migraine me retire tout plaisir à l'ascension, et elle a tendance à s'accentuer avec l'altitude, phénomène classique. La descente se fait dans la tourmente et une visibilité très faible. Nos guides ont une parfaite connaissance des lieux, ils louvoient entre pentes raides et crevasses sans aucune hésitation, alors qu'il n'y plus aucune trace de notre passage. A huit heures nous sommes de retour au refuge. J'ai l'impression que ma tête va exploser. A neuf heures retour à la voiture. Il a vraiment neigé très bas, vers les 4000 mètres. Cela peut paraître bizarre, d'associer bas et 4000 mètres. Mais la veille, la neige apparaissait à 5200 mètres.

11heures 30 nous sommes de retour à Quito. J'ai vraiment envie que notre périple à vélo vers le sud commence, déjà deux semaines que nous sommes dans le coin. Nous allons négocier notre transport avec nos vélos, vers un point situé à une trentaine de kilomètres au sud de la ville pour éviter ce véritable enfer que nous venons de traverser à deux reprises en voiture.

 

J15 mercredi 1 septembre

Avant notre départ pour le refuge du Cotopaxi, nous discutons avec un jeune qui il y a quelques années a traversé l'Amérique du sud à vélo. Il nous parle longuement du sud de la Bolivie, en particulier d'Uyuni et du sud Lipez. L'heure du départ arrive , nous rencontrons notre guide, départ pour le parc du Cotopaxi. Nous quittons Quito par le sud. Le nord est impressionnant, mais au sud, la ville a un aspect tentaculaire surprenant. On dirait qu'elle s'étire à l'infini dans une plaine, dominée d'une multitude de collines complètement colonisées par des constructions. Nous nous imaginons mal quitter la ville dans deux jours en vélo par l'itinéraire que nous suivons ce matin en véhicule. Après une heure de route nous pénétrons dans le parc du Cotopaxi. La région est très belle, et ce grand volcan la domine des ses 5897 mètres. Nous laissons la voiture à 4500 mères. Trois cents mètres de dénivelé le long d'un chemin raide nous donnent accès au refuge, grande bâtisse au toit jaune. Il se met à neiger et cela ne s'arrêtera pas durant notre séjour jusqu'au lendemain matin. Nous nous allongeons pour un bref repos à 19heures, réveil prévu à minuit.

J14 mardi 31 août

Journée à Quito

Je passe une très bonne nuit, couché à 17h et réveillé à 5h du matin. Cela ne m'était jamais arrivé. Jean et Alain rentrent de leur bivouac à 4400 mètres. Ils sont enthousiasmés. La vue de Quito de là-haut, de nuit, était extraordinaire. Ils ont vu les sommets environnants, qui étaient restés cachés lors de l'ascension que nous avions faite la semaine dernière. De plus, Jean à son tour a pu observer la Croix du Sud.

Je l'accompagne en fin de matinée à l'ambassade. Son passeport provisoire, valable un an, est prêt. En début d'après-midi il va au bureau de l'émigration équatorienne, pour régulariser sa situation. Tout est bien qui finit bien.

En milieu d'après-midi, il se met à pleuvoir. Nous ne sommes cependant pas trop inquiets pour la suite. Demain départ pour le refuge du Cotopaxi.

 

J13 lundi 30 août

Journée à Quito

Les démarches pour renouvellement du passeport sont bien enclenchées, bien que le premier contact avec l'ambassade ait été plutôt froid. Je profite de cet arrêt forcé pour faire de l'espagnol en lisant le journal. De nombreux articles sur la vie locale, en particulier l'un d'entre eux qui relate les conditions de circulation et le dénombrement des accidents de la route!

Balade l'après-midi dans le quartier historique. Nous allons sur un petit marché très original, où l'on vend principalement des fruits, en particulier les fameux babako, qui produisent un si bon jus lorsqu'on les mixte.(dès que je peux je mets une photo).

Jean et Alain décident de partir bivouaquer sur les pentes du volcan, le Pinchincha, qui domine la ville, en prenant le téléphérique qui les laisse à 4100 mètres. Pour ma part je préfère rester dans ma chambre.

 

J12 dimanche 29 août

journée forcée à Quito

Hier soir Jean a oublié sa sacoche sur une chaise de l'hôtel et elle a disparu. Consternation, malgré un branle-bas général dans l'hôtel, elle ne réapparaîtra pas. De plus nous sommes dimanche, l'ambassade est fermée, il faut attendre lundi. Il va cependant faire une déclaration de vol au commissariat, où il peut voir toute la faune locale.

Donc journée de repos forcé, il faut dire que les jours derniers nous avons beaucoup donné. Cependant, aucun d'entre nous n'a de courbatures. Cela nous semble de bon augure pour les grosses épreuves qui nous attendent en Bolivie du côté du désert de l'Atacama.

Cet arrêt forcé nous permet de prendre le temps et de lire les journaux locaux. Notre compréhension de l'espagnol s'améliore. Nous en profitons pour découvrir cette ville tentaculaire qu'est Quito.